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Karel Yon : Le syndicalisme est politique : Question stratégiques pour un renouveau syndical
Le syndicalisme est politique : le grand mouvement social pour nos retraites vient d’en faire la démonstration. En remettant sur le devant de la scène les réalités du travail, la grève, la solidarité interprofessionnelle, les syndicats ont enclenché une dynamique de politisation des classes populaires…
C’est un fait avéré : le syndicalisme se retrouve de plus en plus impuissant après des décennies de néolibéralisme qui ont considérablement réduit ses marges de manœuvres, dans les entreprises comme dans la société.
Les centrales ayant fait le choix de l’intégration au management ont pu s’en rendre compte lors du dernier mouvement social, en faisant face à un « mur néolibéral ». De plus en plus, les syndicats se sont vu transformer en organisations de mandaté·es, expert·es et déconnecté·es du salariat.
Dans Le syndicalisme est politique : questions stratégique pour un renouveau syndical, Karel Yon et 7 autres chercheurs et chercheuses, augurent une repolitisation du syndicalisme. Cela passerait en partie par la participation à un nouveau front populaire, appuyant et se servant de l’État pour retrouver une légitimité, dans le domaine de la production bien sûr, mais aussi dans la démocratie toute entière.
Cette proposition, bien qu’éloignée de la stratégie syndicaliste révolutionnaire de notre organisation, offre des questionnements et des sujets de débats.
Des analyses sociologiques permettent de justifier des propositions communes. Un chapitre sur le mouvement des Gilets jaunes et de son rapport avec le syndicalisme montre l’intérêt capital de la sociabilité dans une perspective politique pour un large pan du prolétariat (employé·es de TPE, fonctionnaires hospitalier·es, etc…), justifiant alors un développement des unions locales sur le modèle des bourses du travail.
Si la plupart de l’aspect revendicatif développé dans ce livre relèverait, quand bien même d’une alliance avec les partis de gauche et de la nécessité d’un rapport de force, ces propositions sont l’occasion de mettre en lumière un manque avéré de perspectives pour le syndicalisme et de proposer des objectifs à moyen terme.
La critique socio-historique de nos organisations met en exergue des sujets sur lesquels nous ne pouvons pas rester sans réponses, tels que la connaissance de l’entreprise, les orientations dans la production, les réformes d’un pseudo « dialogue social », l’impossibilité de pouvoir prétendre à la reprise en main de l’appareil de production ou simplement même le contrôle ouvrier, l’incapacité à lier ensemble la transition écologique et l’action syndicale, la contradiction entre intégration nécessaire du prolétariat féminin et tradition viriliste voire masculiniste dans les syndicats.
Un chapitre traite de la prise en compte des violences sexistes et sexuelles dans le syndicalisme (toujours pas acquise partout). Il met en évidence le nécessaire travail qu’il reste encore à faire pour ouvrir le syndicalisme à l’étendue de la classe qu’il prétend représenter.
À partir d’une analyse des dynamiques en court lors du mouvement retraite de 2023, ayant montré qu’un syndicalisme, quand il est rassemblé, est capable de se faire le porte-parole d’une classe, l’ouvrage offre donc des fragments de réflexions sur la direction que pourrait prendre des organisations enregistrant une hausse de syndicalisation.
Judi (UCL Caen)
Karel Yon (dir.), Le syndicalisme est politique : Question stratégiques pour un renouveau syndical,, Éditions La dispute, septembre 2023, 204 pages, 16 euros.
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