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Turquie : des fraudes massives pour étouffer la dissidence kurde 03/04
Des élections municipales du 31 mars 2024, on retiendra la déroute de l’AKP, le parti islamo-conservateur de Recep Tayyip Erdoğan. Dans les régions kurdes sous occupation militaire, les fraudes massives – observées par nos liens directs sur place – n’ont pas empêché la victoire du Dem Parti, le principal parti de la gauche kurde. L’État turc attaque à présent les résultats du scrutin, et la population descend dans la rue.
Au niveau national, c’est le CHP, le parti kémaliste historique (centre-gauche nationaliste) qui a chassé l’AKP de nombreuses mairies. Mais au Bakûr (Kurdistan de Turquie), c’est le Parti de l’égalité et de la démocratie des peuples (Dem Parti) qui s’impose en remportant dix provinces (contre huit en 2019) et 82 villes, soit 16 de plus qu’en 2019. Cette victoire aurait du être plus grande encore, trois provinces (Bitlis, Kars et Şırnak) ayant été perdues en raison des fraudes électorales orchestrées par le gouvernement AKP : des milliers de soldats ont été amenés en convois pour voter (souvent plusieurs fois) dans les villes du Kurdistan acquises au Dem Parti. Là, la pression du régime est la norme : des policiers et soldats en armes à proximité des isoloirs, des véhicules blindés dans l’enceinte des écoles où l’on vote, des pressions pour voter AKP contre un peu d’argent, ou sous la menace de perdre son emploi, etc.
Tous ces soldats sont stationnés dans les communes frontalières en raison de la guerre menée au Kurdistan d’Irak, mais leur répartition est organisée par l’État turc pour maintenir une pression constante sur toutes les provinces kurdes.
Dans les petites et moyennes villes, la fraude est visible et décomplexée. Quand la presse européenne se félicite d’élections qui se seraient « bien passées », elle répète les éléments de langage de la propagande d’Erdoğan, invisibilisant la situation au kurdistan. Les observateurices du Conseil de l’Europe sont quasi absent·es ; leur délégation n’est allée qu’à Diyarbakır (Amed), où elle n’a pas pu constater les fraudes massives qui ont affecté le reste du pays.
Bras de fer victorieux autour de la ville symbole de Van
Mais la triche et l’intimidation n’ont pas empêché la victoire de l’opposition. A Van, le gouvernement AKP a tenté d’invalider l’élection d’Abdullah Zeydan à la mairie, avant de renoncer devant l’intense mobilisation populaire autour de cette ville symbole du Kurdistan. La mairie restera donc au Dem Parti. La lutte a payé !
Des manœuvres de coup d’État analogues avaient été déployées en 2016 et 2019 pour empêcher le Parti démocratique des peuples (HDP), prédécesseur du Dem Parti, de s’emparer des mairies. À ce jour, les co-maires et élu⋅es municipaux du HDP sont toujours emprisonné⋅es. L’Etat a donc déjà, pendant huit ans, confisqué un pouvoir démocratiquement élu.
La population est dans les rues dans de nombreuses villes du Bakûr pour protester contre cette usurpation et a ainsi obtenu le recul d’Erdoğan. De nombreuses personnes ont été blessées et arrêtées par la police.
La guerre de l’Etat turc contre les Kurdes, à l’intérieur et à l’extérieur de ses frontières
Dans son discours le soir des élections, Erdoğan a répété sa volonté de « sécuriser la frontière avec l’Irak avant l’été » et de créer une « corridor de sécurité » de 30 kilomètres sur le territoire du Rojava, le long de la frontière syrienne. Il réaffirme ainsi sa volonté d’intensifier sa guerre contre les Kurdes par delà les frontières.
La mobilisation – sur place comme au niveau international – détermine le rapport de force qui peut être opposé à l’AKP. L’enjeu est d’enrayer la destitution des maires du Dem Parti largement élus ce dimanche !
Restons vigilant⋅es et mobilisé⋅es, gardons nos yeux braqués sur ce qu’il se passe au Kurdistan !
Vive la résistance du peuple kurde ! Bijî berxwedana Kurdistan !
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