Casse des droits sociaux : Femmes, debout contre la réforme des retraites !
Casse des droits sociaux : Femmes, debout contre la réforme des retraites !
Nous connaissons maintenant les contours de la nouvelle réforme libérale des retraites annoncés par Elisabeth Borne le 10 janvier : des pauvres toujours plus pauvres qui crèvent plus tôt, et des riches toujours plus riches qui vivent plus longtemps sur le dos des autres, et encore plus sur celui des femmes !
Pour rappel, deux phénomènes essentiels expliquent les écarts de pension entre les hommes et les femmes : les inégalités de salaire et de durée de carrière (temps partiels, carrières hachées). De fait, la retraite amplifie les inégalités de salaires : si les salaires des femmes sont inférieurs en moyenne de 22 % à ceux des hommes, leurs pensions de droit direct (c’est-à-dire sans la réversion) sont inférieures de 40 % à celles des hommes [1].
Parmi les deux annonces phares du gouvernement, seule la question des aidant·es paraît une avancée pour les femmes dans ce nouveau projet de réforme. Les femmes représentent au moins la moitié à deux tiers de cette catégorie, en fonction des études et des situations, et sont doublement concernées. Majoritairement dépendantes et principales pourvoyeuses d’aide, les femmes sont, davantage que les hommes, touchées par ce phénomène, en raison notamment d’une espérance de vie plus longue [2]. Par contre, le passage de l’âge légal de départ à la retraite à 64 ans et l’accélération de la réforme Touraine accentuent les différences du montant des pensions de retraite entre hommes et femmes. Cette réforme condamne les femmes à la décote obligatoire (carrière courte et hachée), et à une vie de misère et de dépendance une fois le bel âge arrivé [3]. La prise en compte du congé parental, c’est de la poudre aux yeux gouvernementale.
Notre classe ne doit pas oublier
Malgré une vive contestation de millions de personnes dans la rue pendant de longues semaines, la réforme Woerth de 2010 (sous Sarkozy) relève progressivement l’âge légal de départ à la retraite de 60 à 62 ans pour tout le monde. L’âge de l’annulation de la décote passe de 65 à 67 ans. En 2014, sous Hollande, la réforme Touraine inscrit dans le temps le principe de l’allongement de la durée de cotisation pour obtenir une retraite à taux plein, soit 43 annuités.
À son élection, Macron promet de créer un régime universel des retraites à points qu’il présente en décembre 2019. Le 5 décembre, un million et demi de manifestant·es défilent dans la rue. Le mouvement de grève est très important dans les transports et se propage vite à d’autres secteurs. Avec ces mobilisations et la vigueur du mouvement féministe, la situation dégradée des retraites des femmes émerge au premier plan [4]. Macron abandonne son projet, et pas seulement à cause de l’épidémie Covid 19.
Son projet de loi 2023 s’inscrit dans la ligne directe de ceux de ses prédécesseurs, sur les mêmes ressorts, les mêmes mensonges. L’entrée dans l’emploi des femmes est de plus en plus tardive, leurs carrières sont donc plus courtes, elles sont aussi plus précaires que celles des hommes. Si l’âge légal de départ à la retraite est de 64 ans, très peu seront à même de pouvoir partir avec une retraite complète à cet âge-là en ayant validé les 43 annuités nécessaires, soit 172 trimestres. Tout nouvel allongement de la durée de cotisation ne fait donc qu’aggraver les difficultés des femmes à réunir une carrière complète, avec en conséquence une baisse des pensions [5]. Le projet actuel accélère la mise en œuvre de la réforme Touraine, pour imposer les 43 annuités en 2027 au lieu de 2035. C’est un vaste processus d’appauvrissement, en particulier pour les femmes.
Une réforme plus juste pour les femmes ?
Aux inégalités de salaires, les inégalités de pensions entre les sexes tiennent aussi aux carrières en moyenne plus courtes des femmes, notamment avec les congés maternité et parental. Dans ce projet de réforme, la prise en compte de ceux-ci n’intervient que pour les carrières longues, soit pour les femmes ayant commencé à travailler avant 20 ans.
En refusant de s’attaquer aux inégalités de carrières et de salaires entre femmes et hommes, on sait que ce sont les mères qui continuent à supporter majoritairement les ajustements professionnels postnaissance par une baisse du temps de travail ou une interruption d’activité. Les conséquences sont une difficulté à revenir dans l’emploi et à retrouver un poste équivalent. De fait, ces interruptions ou réductions affectent les droits à la retraite [6]. Selon la dernière enquête Insee sur le sujet : « Après une naissance, un homme sur neuf réduit ou cesse temporairement son activité contre une femme sur deux ».
La plus faible rémunération des femmes, la faible rémunération du congé parental et les questions liées aux stéréotypes genrés impactent leurs possibilités de choix [7].
Une étude d’impact révélée par Les Échos indique notamment que les femmes partiront en moyenne sept mois plus tard à la retraite, contre cinq pour les hommes ! Nous ne voulons pas travailler plus, nous voulons travailler moins. Nous ne voulons pas nécessairement vivre vieilles et vieux, nous voulons vivre mieux et en bonne santé. Cette réforme ne doit pas passer et cette victoire doit être une marche vers de nouvelles conquêtes sociales pour toutes et tous.
Faisons un grand pas en avant dans la lutte !
Au cœur de cette bataille, arrivera le 8 mars, et les femmes doivent se propulser au centre des revendications d’égalité sociale et salariale. Les femmes travaillent majoritairement dans des secteurs sous-payés, précarisés et dévalorisés, exclus des logiques de reconnaissance de pénibilité, comme le tertiaire, l’éducation, le social, la santé…
La victoire contre ce projet de loi ne s’obtiendra pas avec une grève par procuration, en laissant certains secteurs se mobiliser et s’isoler. La crise sanitaire a démontré que les femmes travaillent très majoritairement dans les secteurs essentiels pour que la société puisse tout simplement fonctionner. Elles ont donc une responsabilité particulière du fait qu’elles exercent des métiers et des activités stratégiques. Elles prendront leur place et feront valoir leurs revendications. Au boulot comme à la maison, vive la grève totale !
Anne (UCL Montpellier)