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Avec tous tes frères étrangers, de la MOE aux FTP-MOI, Dimitri Manessi et Jean Vigreux
Le 21 février dernier, 80 ans jour pour jour après sa exécution, Missak Manouchian entrait au Panthéon accompagné de son épouse Mélinée. De beaux discours furent prononcés pour rendre hommage et saluer le résistant arménien « mort pour la France »… et notamment par ceux-là même qui votaient une énième loi immigration qui fut saluée par les descendant·es politiques des assassins des Manouchian et de ses autres camarades de l’Affiche rouge.
Un voile pudique a cependant été posé sur le parcours du militant communiste Manouchian et sur l’importance dans la résistance de ces militant·es communistes de langue étrangère organisé·es avant la guerre dans la Main-d’œuvre étrangère, qui devient par la suite MOI, la Main-d’œuvre immigrée au sein de la Confédération générale du travail unitaire (CGTU) et du Parti communiste. C’est cet oubli que vient réparer l’ouvrage dense et richement documenté de Dimitri Manessis et Jean Vigneux, déjà co-auteurs chez Libertalia en 2022 de l’excellent Rino Della Negra, footballeur et partisan.
De la création des groupes de langue au sein de la CGTU à la résistance armée qui donnera naissance aux FTP-MOI, en passant par l’engagement dans les Brigades internationales et jusqu’à la fin de la MOI dans les années 1952-1953, les auteurs retracent, dans ce qu’ils présentent comme une première synthèse, l’histoire sinueuse de ces militants et militantes, même si ces dernières sont victimes d’une « (double) invisibilisation ». Si la mémoire communiste a su dès le début des années 1950 mettre en avant ces militant·es résistant·es de la FTP-MOI, « frères » et « sœurs » en humanité comme ont dit alors dans le discours communiste, l’histoire des rapports entre ces groupes organisés selon la langue (plutôt que la nationalité) : Italiens, Juifs, Arméniens, etc., fut plus compliquée et parfois réellement conflictuelle.
L’ouvrage, en redonnant corps aux combats de la MOI au-delà de la seule évocation de l’Affiche rouge, replace ces militant·es dans une histoire des luttes ouvrières où se mêlent luttes sociales, xénophobie, internationalisme et mémoires militantes, leur rend un hommage autrement plus sincère que les « honneurs de la République ».
David (UCL Savoies)
Jean Vigreux, Dimitri Manessis, Avec tous tes frères étrangers. De la MOE aux FTP-MOI, Libertalia, février 2024, 270 pages, 10 euros.
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Extrême droite aux élections législatives : Une contre-offensive de classe et de masse [est nécessaire]
« Nous ne sommes pas effrayé·es le moins du monde par les ruines. Nous allons hériter de la terre, cela ne fait pas le moindre doute. La bourgeoisie peut détruire et ruiner son propre monde, avant de quitter la scène de l’histoire. Nous transportons un monde nouveau, ici, dans nos cœurs ». Buenaventura Durruti, ouvrier anarcho-syndicaliste espagnol.
Quels que soient les résultats des élections législatives anticipées, sans renier que ces résultats influeront sur la situation politique et sociale immédiate, nous devrons continuer à nous mobiliser pour faire avancer nos revendications. Seules les luttes collectives pourront constituer une alternative au libéralisme et au fascisme. Sur quoi pouvons-nous nous appuyer dans cette période ? Quel est le rôle des révolutionnaires ? Comment faire pour arracher des victoires ?
Les grèves se multiplient depuis la crise du Covid-19
S’il y a un mouvement de fond installé depuis le Covid-19, c’est bien celui de la conflictualité dans les lieux de travail. Entre 2021 et 2022, le nombre de journées individuelles non travaillées pour fait de grève a augmenté de 71% ! À la première place des revendications : la rémunération.
En Loire-Atlantique, plusieurs secteurs ont connu des grèves cette année, dont la métallurgie, l’agro-alimentaire, le BTP (INEO, filiale de Bouygues), la presse (Ouest France), les sociétés de services numériques (Smile, Capgemini, Accenture), etc. Pour ces deux dernières entreprises, il s’agit d’un événement en soi, tant le secteur est un désert syndical proportionnellement au nombre de salarié·es.
Les chiffres ne suffisent pas
Notre camp dénonce souvent les chiffres de milliards de profits des capitalistes pour mobiliser. Mais cela a un effet distanciant, les chiffres étant trop éloignés de la réalité des travailleuses et travailleurs. Les grèves des travailleuses et travailleurs partent d’un constat simple : la difficulté à boucler les fins de mois, l’arbitraire du patron, les conditions indignes, etc. Savoir que l’entreprise fait des bénéfices record est important, mais ce n’est pas l’information principale pour lancer une grève. C’est la réalité du terrain qui prime.
La majorité des patrons d’entreprises, souhaitant l’arrêt des grèves, revoient leur propositions à la hausse. Si les propositions sont tellement basses que le patronat maîtrise la marge de hausse, cela n’en fait pas pour autant une défaite pour notre camp. Car il faut voir aussi ce qu’un climat de grève permet dans une entreprise. Prenons l’exemple de la grève de février 2024 dans l’entreprise Kuehne Nagel près d’Angers [1]. L’activité sur la plateforme a commencé en 2020, employant 400 salarié·es, majoritairement des intérimaires et des travailleuses et travailleurs immigré·es. Les conditions de travail y sont particulièrement difficiles, les salaires bas, et la précarité partout.
Aucune organisation ni culture syndicale n’était présente. Le travail de persévérance d’une équipe syndicale ne faisant pas partie de l’entreprise, et l’aide de l’Union locale CGT pour s’implanter dans cette usine, a permis la création d’une petite section, du lien avec les autres ouvriers et ouvrières une dynamique de solidarité entre les intérimaires et les internes. Suite à l’annonce d’une augmentation de la cadence qui s’ajoute à toutes les autres conditions d’exploitation, 200 salarié·es en CDI, et jusqu’à 90% d’intérimaires décident de faire grève. D’abord par des débrayages de deux heures les deux premiers jours et grève avec occupation de l’usine les deux derniers jours.
Des possibilités ouvertes
Pris de court, et avec des tentatives échouées de divisions, le patron a alors dû signer un accord de fin de grève au bout des quatre jours avec :
1. l’annulation de l’augmentation des cadences ;
2. l’embauche de 80 intérimaires en CDI ;
3. l’augmentation de 130 euros par mois de la prime de productivité. Une vraie victoire au regard de la situation moins d’un semestre avant !
Sans oublier la culture de liens et de solidarité qui se noue entre les travailleuses et travailleurs depuis cette mobilisation, cet exemple nous montre :
1. L’importance d’une Union locale interprofessionnelle combative qui a apporté l’expérience de ses militant·es (juridiques, d’anticipation des pièges du patron, de soutien logistiques etc.) à des travailleuses et travailleurs qui ne voulaient plus se laisser faire.
2. Que même dans le secteur privé avec différents types de contacts (CDI, intérimaires, etc.) c’est possible de faire grève et de gagner.
Mais les quelques victoires éparses dans les entreprises ne peuvent cacher la forêt de la destruction de la planète et des conditions de travail. C’est pourquoi nous devons nous renforcer et nous saisir des outils de défense de notre classe et ouvrir les brèches. Malgré ses imperfections et ses limites, le syndicat est un outil d’organisation central dans le lieu de travail. Sans doute, ses formes actuelles ne répondent pas à toutes les configurations des lieux de travail, ni aux transformations majeures des dernières décennies.
Notre rôle en tant que révolutionnaires
Notre rôle est de bâtir notre force collective dans l’outil syndical, sans le vider de son sens politique : un moyen de maintenir la conflictualité, même défensive, entre nous producteurs et productrices de richesses et le Capital. En tant que communistes libertaires, si nous avons appelé à faire le choix tactique de voter Nouveau Front populaire pour empêcher l’arrivée de l’extrême droite au pouvoir, nous restons convaincu·es que notre rôle est de participer, renforcer et unifier les luttes qui émergent de notre classe sociale.
Que ce soit sur les salaires, les luttes écologiques, les luttes anti-impérialistes, contre les guerres, ou les oppressions. Notre énergie doit être concentrée sur cet objectif : organiser notre classe, notre camp social. La puissance d’agir et du changement de la réalité viendra de la mobilisation des masses.
S’organiser sur le temps long
Nous avons perdu la bataille pour nos retraites en 2023 ; l’étau de la bourgeoisie asphyxie notre quotidien. Aujourd’hui, notre classe est menacée par l’arrivée au pouvoir de l’extrême droite. Si les perspectives de ré-enchantements révolutionnaires et émancipatrices ne se dessinent pas sur le futur proche, cela ne doit pas imposer la fatalité de la défaite, ou la résignation.
Faisons le bilan de nos engagements et de nos actions, ce qui n’a pas fonctionné dans les mouvements sociaux et nos erreurs, et construisons par les plus petites actions notre pouvoir d’agir sur la réalité. En commençant par ce qui peut paraître banal : s’ancrer dans son territoire et tisser les liens dans le quartier, le lieu de travail, lieu d’apprentissage et avec son entourage. Nulle force de lutte sans ancrage.
UCL Nantes
[1] « Près d’Angers, pourquoi les intérimaires et les salariés en CDI font grève à Kuehne-Nagel », Ouest-France, 1er février 2024.
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Ni oubli, ni pardon : Honorer Clément Méric en faisant vivre ses combats
Après un hommage massif d’une semaine pour les 11 ans de l’assassinat de Clément Méric par des fascistes, la manifestation de cette année a été marquée par l’actualité, notamment internationale.
Comment faire vivre la mémoire de nos luttes au présent ? La manifestation du 1er juin en l’hommage de Clément, militant antifasciste assassiné en 2013 par des néo-nazis, en a apporté un exemple concret. La manifestation syndicale et politique annuelle s’est en effet tenue dans un contexte particulier, quelques jours après le début de l’offensive meurtrière israélienne sur Rafah et alors que l’État français envoyait l’armée mater la révolte du peuple kanak contre la modification de la loi électorale visant à faire taire les voix indépendantistes.
C’est donc dans une dynamique unitaire large et anticoloniale qu’un cortège particulièrement massif de milliers de personnes s’est réuni dans les rues parisiennes, particulièrement jeunes. Les mots d’ordre mettaient en avant une lutte commune contre la violence coloniale et raciste, qui sert de ferment au développement de l’extrême droite. La dimension internationale des meurtres fascistes a été rappelée en mettant en avant les autres camarades assassinés ces dernières années en Europe, comme le rugbyman Federico Aramburu à Paris en 2022. Et c’est afin de renforcer notre solidarité avec les luttes en cours contre tous les colonialismes que l’UCL a défilé parmi les organisations indépendantistes kanaks, venues en nombre. Les organisations syndicales étaient également présentes, principalement Solidaires, mais également la CNT et la CGT, pour rappeler que l’antifascisme est bien une lutte syndicale.
Car tant que les racines matérielles de l’extrême droite ne seront pas arrachées, elle demeurera un danger mortel pour notre camp et notre classe. C’est pourquoi il faut mener haut notre opposition au racisme, au patriarcat, à la transphobie et à l’homophobie, au capitalisme et au colonialisme, qui nous divisent et se nourrissent les unes des autres dans un monde toujours plus inégalitaire et violent.
Et la vague d’extrême droite lors élections européennes une semaine après cette manifestation, notamment en France, ne fait que confirmer cette nécessité urgente : seule l’unité antifasciste la plus large nous permettra de reprendre l’initiative. Elle est nécessaire, sur une base révolutionnaire et populaire, pour proposer une nouvelle société plus désirable que celle de la haine de tous contre chacun et du renforcement des oppressions. Renforçons les syndicats, les collectifs Palestine, les associations trans et féministes, les organisations antiracistes, et menons ensemble les luttes unitaires à partir de la base qui, seules, pourront véritablement mettre fin au fascisme.
Hugo (UCL Paris Nord Est)
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Les Utopiques n°25 : 25 ans, cela se fête !
Comme indiqué dans la revue, cette date des 25 ans de Solidaires est en partie inexacte puisque l’histoire narrée dans une des contributions renvoie à 28 ans, si on évoque SUD PTT, et SUD Santé remonte à 36 ans. Si on s’attache à l’histoire de Solidaires celle, de Solidaires Finances publiques, la jauge atteint 76 ans et même 106 ans en ce qui concerne le Syndicat national des journalistes (SNJ), fondé en 1918. Mais alors, pourquoi cette approximation des 25 ans ? La réponse tient dans le concept de mémoire collective de cette organisation qui est le fil conducteur de ce numéro.
La date retenue symboliquement est le congrès de décembre 1998 où fut décidé de mettre « Solidaires » dans le nom statutaire commun à l’ensemble des syndicats SUD (pour « Solidaires, unitaires, démocratiques ») et autres composantes des organisations qui composaient alors « le Groupe des dix ». Mais ne nous égarons pas en chemin en arrêtant l’histoire à une forme de commémoration. Ce numéro est tout sauf cela. Le sujet reflète davantage le partage, l’échange, la pluralité d’un apprendre ensemble et solidifier des liens de solidarité interprofessionnelles.
L’Union syndicale Solidaires repose sur des cheminements divers ; sur des professions différentes, sur des parcours syndicaux multiples : les rédacteurs et rédactrices durent faire des choix éditoriaux pour refléter cette diversité. Premier objectif, représenter les différentes facettes de l’histoire de Solidaires d’où pour les plus anciens : un article sur le Syndicat national des journalistes (SNJ), un autre sur le Syndicat national unifié des impôts (SNUI, aujourd’hui Solidaires Finances publiques). SUD PTT et SUD Santé Sociaux ne sont pas non plus oubliés ni cette grève de 1995 qui fut « l’éclosion des SUD », évoquée par Christian Mahieux à travers l’exemple du secteur ferroviaire.
L’expérience de SUD Industrie est également relatée pour illustrer le cheminement de syndicats d’entreprise vers des syndicats départementaux. Les Unions interprofessionnelles locales et départementales sont des pièces essentielles du syndicalisme des SUD. L’expérience en Loire-Atlantique raconte ici ces évolutions. Le numéro se compose aussi de regards sur l’activité militante, sur ces débats organisationnels et syndicaux qui ont structuré et formé ces particularités de gestion interne comme la recherche du consensus et le refus de se limiter à des rapports de pouvoir de majorité/minorité.
Le volume anniversaire entre en résonance avec la volonté d’ouvrir Les Utopiques aux autres courants syndicaux, aux contributions de militantes et militants d’autres organisations. Engagements militants, intelligence politique mais également respect des personnes, autant de fils conducteurs des SUD, se connaître, se respecter et agir ensemble pour gagner des revendications, n’omettant jamais de penser une société plus juste et plus humaine. Essayer de vivre et de penser une relation égalitaire et confiante !
Nombreux et nombreuses sont les personnes impliquées dans ce numéro spécial, qui n’est pas un hommage ni lefruit d’un culte de la personnalité ou d’une quelconque idolâtrie ! C’est un numéro pluraliste, à l’image des Sud, dans lequel s’y croise plus de noms, de photos de militantes et de militants qu’à l’accoutumée. En résumé, c’est un volume foisonnant qu’offre là Les Utopiques, qui se veut l’expression de cette citation. « Mais l’outil commun, Solidaires, n’est propriété de personne, il nous appartient à tous et toutes, celles et ceux qui l’ont fait vivre, le faisons vivre, le ferons vivre ; vivre et évoluer en fonction d’une perspective, celle de l’émancipation sociale. Le syndicat est à chacune et chacun d’entre nous, mais n’existe et n’est utile que sous sa forme collective. » Souhaitons encore de nombreux printemps à cette revue et à cet esprit solidaire. On associe souvent les 25 ans à l’âge de raison, n’omettons pas la déraison.
Dominique Sureau (UCL Angers)
Les Utopiques, n°25, éditions Syllepse, avril 2024, 192 pages, 15 euros.
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Dossier #AlternativeLibertaire : Face aux JO, construire un sport émancipateur et solidaires
- Jeux Olympiques, Coupe du monde : Le sport au service des États et du Capital
- Histoire : Aux origines antifascistes du foot féminin italien
- 1936 : L’Olimpíada Popular contre les Jeux de Berlin
- Roller derby : Construire un sport féministe et queer
- Palestine : Le football palestinien dans la résistance
- Antiracisme : Islamophobie dans le foot : le RN et la FFF contre les femmes
- Football : Carton rouge…et noir ?
- Footballeurs contre la dictature : La « démocratie corinthiane », une utopie footballistique
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Législatives : Les élections, thermomètre passif du fascisme
Face à la possibilité imminente de l’arrivée de l’extrême droite à Matignon, l’Union communiste libertaire a fait le choix d’appeler à voter « sans illusions ni scrupules » pour lui barrer la route. Un choix tactique, qui n’éclipse pas une critique de fond de la démocratie bourgeoise.
La récente dissolution de l’assemblée nationale après les élections européennes a mis en évidence le fait qu’un système politique peut être profondément anti-démocratique tout en reposant sur un système de suffrage universel. Tout d’abord, l’absence de délai raisonnable entre l’annonce des élections législatives et leur tenue a rendue impossible toute campagne pour les partis : ces derniers n’ont pas eu le temps nécessaire pour former ou réactiver leur base militante, adapter leurs supports de communication ou faire connaître leurs candidat·es en les associant à des éléments forts de leurs programmes.
Un cadre qui favorise l’extrême droite
Ce délai très court a donc créé, de fait, une rupture entre les catégories sociales disposant du temps et des outils pour rechercher les informations liées aux programmes (qu’il s’agisse des projets des partis ou de la critique qui peut en être faite) et les autres. De même, les débats qui jalonnent une campagne demandent une préparation des candidat·es, qui doivent être formé·es à la présentation des idées ou aux discussions en opposition sur des points de programmes précis, et permettent normalement de faire connaître les lignes directrices des différents partis à l’ensemble des électeurs et électrices.
Le processus démocratique associé à l’élection doit donc laisser à ces derniers et dernières une période de réflexion et de discussion qui prend appui sur les débats publics, afin de construire une opinion avant le vote. En l’absence de discussion et d’espace de réflexion, les idéologies les plus répandues dans le contexte social bénéficient d’un avantage de fait dans le débat d’idées, puisque leur implantation leur donne une apparence de simplicité et de « bon sens ». Dans le contexte actuel de montée lente mais inexorable de l’extrême droite, les idées fascistes et réactionnaires bénéficient donc d’un avantage sur celles des mouvements de gauche, puisque ce sont elles qui sont les plus discutées au quotidien dans l’espace public.
Des logiques autoritaristes
Selon une analyse plus globale des systèmes électoraux, ils sont par essence vecteurs d’épuisement militant : les élections concentrent l’engagement sur des périodes très réduites, durant lesquelles l’investissement dans les tractages, recherches de signatures... deviennent le centre de la vie des militant·es, avant de cesser brutalement après l’élection. Ce surinvestissement sur des temps courts favorise des logiques d’implication à court terme, les militant·es étant, à l’issue de l’élection, souvent trop fatigué·es et parfois trop peu formé·es pour entamer un travail de fond le reste de l’année. Les mécaniques électorales favorisent donc un fonctionnement basé sur des engagements ponctuels, avec un début et une fin,qui ne permettent pas de s’engager efficacement pour la diffusion d’idées progressistes, condamnant la gauche à la réaction par rapport au travail de sape des droits organisé par les droites.
Ce processus est accentué par la constitution de collectifs qui, à l’image de LFI, ne se constituent pas en parti à proprement parler et négligent la formation de fond de leurs militant·es. L’investissement fort demandé au moment des élections favorise également un engagement émotionnel, souvent associé étroitement à la personnalité d’un·e candidat·e, qui amplifie la fatigue et entretient des logiques autoritaristes en faisant incarner un ensemble d’idées par une personnalité plutôt que par un groupe. Ce fonctionnement hiérarchisé entre des leaders et un collectif qui les soutient ne permet pas d’assurer un fonctionnement participatif au sein du parti lui-même. Les militant·es n’ont que peu d’influence sur les idées portées par le parti et sur ses lignes politiques, sauf à réussir à monter en hiérarchie, processus qui favorise les personnes les plus privilégiées dans la société (hommes blancs, cis, hétéros, valides).
Cet engagement quasi religieux a pu être retrouvé dans les appels au vote durant la campagne des législatives, au cours de laquelle toute analyse matérialiste de la situation a été rejetée en bloc au prétexte de l’urgence du moment. De même, la réaction de sidération collective à l’annonce des résultats du premier tour est symptomatique d’un manque d’engagement collectif à long terme. Les résultats de l’extrême droite sont équivalents à ceux obtenus lors des élections européennes et reflètent l’ambiance sociale réactionnaire des dernières années en France où les idées fascistes sont de plus en plus présentes depuis au moins les années 1980, soutenues par les gouvernements successifs justement pour servir un agenda électoral.
L’illusion d’un choix
Pour finir, le système électoral ne permet pas d’assurer une représentation des idées et ne constitue pas un mode d’expression pour la population votante, ce qu’il n’a par ailleurs pas vocation à faire. L’absence de comptabilisation des votes blancs, tout d’abord, rend toute une partie de l’opinion exprimée inaudible. Les élections n’ont donc pas pour fonction de représenter les idées des votant·es puisque seuls les soutiens exprimés en faveur d’un parti sont comptabilisés, d’autant que les votes exprimés en faveur d’un parti sont rarement des votes d’adhésion. L’absence d’infléchissement des lignes des partis par leur base ainsi que l’échec des initiatives d’assemblées citoyennes mises en place ces dernières années rend en effet l’expression directe de la population impossible dans ce cadre, d’autant plus dans un système français caractérisé par son centralisme et la concentration des pouvoirs. Le vote, présenté comme un moyen d’expression par les classes politiques et par une grande partie de la population au cours de la campagne de ces dernières législatives, est donc le plus souvent un choix par défaut, même en dehors des périodes d’union face à une menace fasciste.
En donnant l’illusion d’un choix, les élections visent par contre au maintien et à la stabilité du système en place en réduisant autant que possible l’écart entre les opinions dans la population et les gouvernements. Elles sont donc un outil de conservation d’un pouvoir en place, qui favorise par nature les idées réactionnaires, par lequel un changement radical de la société est impossible. Le système politique français doit être vu comme un outil de légitimation d’un pouvoir en place, y compris lorsqu’il est fasciste. Les votes récents pour l’extrême droite illustrent donc l’avancée des idées fascistes dans la société française et ce processus ne peut être stoppé par les urnes : les idées fascistes avancent sur le terrain et le vote peut permettre de repousser l’échéance de leur arrivée au pouvoir, mais reste sans effet sur leur diffusion. Cette dernière lutte ne peut se mener que par un investissement au long court dans le combat contre l’extrême droite.
Marco Pagot
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Elections européennes : cinquante nuances de brun sur l'Europe
À l’heure d’écrire cet article, les effets des élections européennes sont encore incertains en France, où Macron a décidé de dérouler le tapis au Rassemblement national par la dissolution de l’Assemblée nationale. Mais si dans l’hexagone l’extrême droite a connu un bond électoral spectaculaire, ce scrutin a malheureusement été l’occasion de constater que la progression concerne toute l’Union européenne. Y a-t-il basculement du continent vers le brun ? Quelles conséquences possibles pour les travailleurs et travailleuses européennes ?
Rappelons déjà les fondamentaux : dans le fonctionnement de la mégastructure européenne, le Parlement européen qui vient de se renouveler a finalement des possibilités limitées. Certes, il vote les directives rédigées par les commissaires européens et le budget, qu’il peut amender, mais il partage ce vote avec le Conseil de l’Union européenne (l’ensemble des ministres des États membres par domaine), et il ne possède pas l’initiative législative. Il ne dicte pas non plus les orientations politiques de l’UE, prérogatives du Conseil européen (qui rassemble les chefs d’États ou de gouvernement de chaque État). Il ne gère pas la politique monétaire, prérogative de la Banque centrale européenne.
À bien y regarder, ce n’est pas là que le pouvoir réside vraiment ! De quoi relativiser d’emblée l’enjeu de ces élections ou leur réelle portée démocratique, et avec une participation à 51% pour l’ensemble de l’UE (ajoutée à des différences de scrutins entre États qui compliquent la lisibilité du scrutin), il semble bien que ce soit le désintérêt pour cette mise en scène qui ait guidé les classes populaires d’Europe.
Une extrême droite multiforme
Même en prenant en compte ces éléments, il n’en reste pas moins que 180 parlementaires de toute l’extrême droite européenne ont été élus le 9 juin dernier (sur 705 sièges). Dans la plupart des pays de l’UE, l’extrême droite a obtenu des postes, ce qui lui assure ressources et positions supplémentaires. Seuls trois pays, la Slovénie, l’Irlande et Malte, n’ont pas d’élus de ce bord. Cependant, cette progression est inégale selon l’endroit, et l’extrême droite ne présente pas un visage uniforme.
Il y a bien sûr, à l’instar du RN (30 élus), du FPÖ en Autriche (six élus) ou de Fratelli d’Italia en Italie (24 élus), les mouvements historiques de l’extrême droite européenne, qui sont les descendants des organisations directement créées par les partisans du fascisme après-guerre. Généralement ces partis ont tout fait pour gommer cette filiation et présenter une face « respectable ».
Aux côtés de ces formations anciennes, se retrouve aujourd’hui l’ensemble des partis portés par leur « euroscepticisme » et la préférence nationale qui ont pu se créer en surfant sur les déceptions de la politique européenne : c’est notamment le cas de l’AfD allemande (quinze élus), à l’origine un parti libéral et souverainiste, ou encore du Parti pour la liberté hollandais (huit élus), de Vox en Espagne (six élus), ou de Chega au Portugal (deux élus). D’autres encore ont une histoire hybride, comme La Lega italienne (huit élus), ou encore le Fidesz hongrois (onze élus) qui fut jusqu’à présent classé seulement à droite malgré la politique illibérale, nationaliste et autoritaire de son leader Viktor Orban.
Enfin de manière plus marginale se trouve des mouvements ouvertement fascistes comme Notre Patrie hongrois (un élu), Reppublikka en Slovaquie (deux élus), ultraconservateur comme Confédération en Pologne (six élus) ou encore le Mouvement démocrate Patriote grec (un élu), ultranationaliste comme les mouvements AUR et Renaissance en Roumanie et Bulgarie (respectivement six et trois sièges) ou plus atypique comme le mouvement « Il y a un tel peuple » bulgare (deux élus), ou « La fête est terminée » en Espagne (trois élus).
Les différences de formes et de positions n’ont d’ailleurs rien à voir avec les groupes dans lesquels siègent ces formations au Parlement européen : ainsi, le RN français, dans le groupe Identité et démocratie, se retrouvera au côté de La Lega italienne, là où Fratelli d’Italia, siégera avec Reconquête au sein des « Conservateurs et réformistes européens » – où se retrouve les partis les plus radicaux. Une partie des organisations, nouvellement élues, sont sans groupe ou n’ont pas encore choisi.
Le racisme et l’exclusion comme fond commun
Au-delà, ces distinctions n’ont pas vraiment d’importance en soi, les groupes ne reflétant pas non plus les positions prises. Car si les égoïsmes nationaux guident fondamentalement ces formations politiques ils les divisent aussi entre elle. Un autre sujet clivant au sein de l’extrême droite et qui en limite la cohésion est le soutien à l’Ukraine en guerre. Une partie importante de l’extrême droite se présente comme pro-russe (en Hongrie, Bulgarie, Roumanie...) là où une autre considère la Russie comme un ennemi héréditaire (dans les pays Baltes, en Pologne...).
Mais pour le reste, elles ont largement plus en commun : une vision réactionnaire et conservatrice de la place des femmes, réduite à la natalité, la répression des minorités sexuelles, la chasse aux immigré·es, l’anticommunisme et par extension la haine de la gauche, la mise en pièce des libertés individuelles.
Économiquement, même si quelques différences peuvent se sentir, elles sont à grande majorité libérales dans la droite lignée des politiques menées en Europe, contrairement à la démagogie qu’un parti comme le RN peut distiller en France. On ne peut que constater le cynisme de ces formations, qui, se nourrissant d’un ressentiment légitime envers la politique d’austérité et de casse des services publics européenne, en sont finalement l’un des plus grands soutiens. Enfin, elles ont en commun leur défense absolue du modèle économique productiviste et sont vent debout contre les mesures écologiques, même timides, proposées en Europe.
Une UE toujours plus conservatrice et antisociale
Finalement, si les divisions de l’extrême droite européenne vont limiter son pouvoir de nuisance, le poids qu’elle a acquis au travers du Parlement européen, doublé de sa présence ou participation au pouvoir dans six gouvernements européens (Italie, Finlande, Hongrie, Croatie, Slovaquie et Suède), en font un danger non négligeable, notamment dans les tractations menées pour nommer les commissaires européens, qui sont les véritables artisans exécutifs des orientations européennes, et où elle pourrait appuyer les personnalités les plus rétrogrades.
Mais au-delà des structures caractérisées comme telles, c’est bien la diffusion des idées de l’extrême droite dans les autres formations politiques et l’ensemble de la société européenne qui représente le principal défi aujourd’hui. À cela doit répondre chez les révolutionnaires une pratique internationaliste antifasciste forte, la construction de luttes sociales communes, un travail en commun plus fort entre nos organisations politiques et l’aspiration à un projet politique anticapitaliste, démocratique et égalitaire qui dépasserait les frontières.
Hugues (UCL Fougères)
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Don’t Mourn, Organize ! [Agir au lieu de gémir] Edito
La période qui s’ouvre est emplie d’incertitudes. Allons-nous, après la frénésie électorale, bientôt suivie par la frénésie olympique, retomber à la rentrée dans le train-train des manifs-ballons où les militant·es se rendent comme à un pèlerinage, parce qu’on fait ça tous les ans ?
On en appellera à un « troisième tour social », on entendra que la « rentrée sera chaude » et puis, finalement, les mêmes discours cent fois rabâchés, les mêmes pratiques venues d’en haut et hors-sol et, dans trois ans au mieux, on en appellera à un énième vote barrage, sans doute le dernier…
Pourtant, la période à venir peut être porteuse d’un tout autre futur. Des centaines de milliers de personnes se sont rassemblées dans la rue, on dit NON à l’extrême droite, OUI à l’union et à l’action. Cette fièvre politique ne doit pas redescendre une fois les échéances électorales passées. Ce n’est ni à l’Élysée, ni à Matignon et pas plus à l’Assemblée que nous obtiendrons satisfaction… on connaît la suite. Maintenant on s’organise, localement, sur ses lieux de travail, d’étude, de vie pour faire lien et construire des alternatives. On discute, on s’engueule parfois, mais surtout on ne lâche pas l’affaire. La politique c’est nous tou·tes, pas les élu·es ! C’est sur le terrain et dans les luttes que nous construirons les solidarités, à la base.
On s’est redonné un peu de temps, mais l’urgence est toujours là. Alors maintenant on y va, on s’organise !
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Front social contre le fascisme et le capital
Quel bilan tirer de la séquence qui vient de se terminer avec l’annonce des résultats surprise du second tour des élections législatives anticipées ? Le Rassemblement national bien qu’il n’ait pas réussi son pari est solidement implanté sur une grande partie du territoire. Les partis politique de gauche peuvent finalement s’entendre sur un programme de réformes sociales minimales… et surtout sans l’engagement du mouvement social aujourd’hui c’est l’extrême droite qui serait au pouvoir. Il nous faut maintenant battre le fer tant qu’il est chaud et imposer, par la lutte et par la rue, les réformes sociales indispensables pour nous débarrasser définitivement de l’extrême droite et de ses alliés capitalistes et imposer enfin le socialisme.
Si l’on ne peut qu’être soulagé·e que le Rassemblement national n’ait pas réussi à avoir une majorité de sièges à l’Assemblée nationale à la suite de cette dissolution « coup de poker » d’Emmanuel Macron, il faut être conscient·e que nous n’avons gagné qu’un répit. Si l’extrême droite n’est pas majoritaire dans les urnes, ses idées, la vision du monde qu’elle porte tendent, elles, à s’imposer. La « défaite » du RN, relativement aux pronostics et projections initiales, se paye au prix d’une progression du nombre de ses député·es de plus de 60 % !… on a vu défaite plus cuisante.
Le RN est désormais le parti le plus représenté à l’Assemblée nationale (et va recevoir les financements publics qui vont avec), il a recueilli plus de dix millions et demi de voix, plus de 33 % des suffrages exprimés, au premier tour des législatives. Les hauts scores du RN ne lui permettent pas encore d’accéder à Matignon, et en cela nous pouvons êtres soulagé·es et en premier lieux pour les personnes racisées et pour les minorités de genre, premières victimes de l’arrivée des extrêmes droites au pouvoir, mais également pour le monde du travail et nos conquis sociaux, mais ce n’est qu’un répit, gardons bien cela en tête. Le RN a conquis de nouveaux territoires et certains départements ne seront représentés que par des députés RN.
Une « Victoire » au goût amer
Sans illusion et par pur choix tactique assumé nous avions appelé celles et ceux de notre classe qui étaient en mesure de le faire – parce qu’une part non négligeable des classes populaires n’a légalement pas ce droit –, à voter clairement pour les candidat·es Nouveau Front Populaire. Sans illusion parce que cette alliance poussée dès le dimanche 9 juin au soir, et les jours suivants, par des manifestant·es venu·es spontanément descendre dans la rue pour appeler à un rassemblement des forces de gauche n’a de portée qu’électorale.
Le programme du NFP (sans parler des prochaines trahisons qui ne manqueront pas d’arriver) d’inspiration sociale-démocrate et keynésienne ne porte pas la rupture révolutionnaire anticapitaliste, internationaliste et autogestionnaire, seule alternative durable au capitalisme libéral-autoritaire que la« gauche de gouvernement » n’a jamais radicalement combattu et qui s’accommode parfaitement d’une extrême droite dure avec les faibles et douce avec les puissant·es. Si nous n’avons pas participé aux mouvements de célébration de la « victoire » du NFP qui se sont exprimés dimanche 7 juillet chez certain·es à gauche ce n’est donc pas par cynisme mais bien par analyse politique de la situation.
Le « barrage », s’il a cette fois-ci encore fonctionné, a été beaucoup plus compliqué et fragile à mettre en œuvre, et il n’est pas certain que la prochaine fois ce barrage tienne. Au niveau national le RN et ses idées continuent de se diffuser, même si l’on a vu au cours de cette campagne éclair que la « dédiabolisation »n’est qu’un mot pour communiquant·es, et que dans les faits il est toujours un parti rance alimenté par le racisme et la haine des autres sous couvert de retrouver une « France d’autrefois » qui n’est qu’une France de carte postale.
Un déferlement de propose et d’actes racistes
Le racisme débridé dont l’expression s’est subitement accélérée au soir du 9 juin et durant toute la campagne législative ne va pas disparaître du jour au lendemain. Par ailleurs, le « succès »tout relatif du NFP s’est essentiellement construit dans les centres urbains où le« barrage » tient encore tandis que les« campagnes en déclin », marquées par un sentiment de« déclassement collectif » et un fort recul des services publics,votent très fortement en faveur du RN. De leur côté les quartiers populaires et leurs habitant·es,qui sont les premières cibles des réactionnaires, restent également en marge du politique institutionnel cumulant de plus forts taux de pauvreté et de chômage, un plus faible niveau de diplôme et une sur occupation des logements trois fois supérieure à la moyenne métropolitaine.
Il est à remarquer que si le vote des quartiers populaires penche plutôt vers les partis de gauche, il est surtout marqué par une très forte abstention, signe d’un désinvestissement de la sphère politique même si les mobilisations en soutien à Gaza et la cause palestinienne favorisent une repolitisation des quartiers. Ces territoires, les « campagnes en déclin » et les quartiers populaires, que l’extrême droite aime à opposer à des fins électorales et racistes, souffrent des mêmes maux sociaux conséquence de quarante ans de libéralisme et de casse systématique des services publics et des solidarités. Aujourd’hui les organisations politiques et syndicales ne sont guère implantées dans ces espaces et peinent à s’y faire entendre. Le ressentiment à l’égard des « élites », du « centre », des « citadins » ou des autres, s’il s’est construit sur des causes sociales, s’exprime souvent soit en désertant la sphère politique, soit en alimentant un vote soi-disant « contre le système » mais en fait xénophobe et antisocial.
Des fractures sociales et géographiques
L’élan populaire, pas massif mais réel, suscité par le NFP doit aujourd’hui se porter sur la construction d’un mouvement social fort et à l’offensive. La situation institutionnelle qui ne donne aucun vainqueur parmi les trois blocs, de gauche, d’extrême droite et présidentiel (« extrême centre » ultralibéral et illibéral) est aujourd’hui propice à une relance des luttes collectives sur nos propres mots d’ordre et, pour la première fois depuis des années, dans une logique offensive et non plus défensive : réduction du temps de travail, augmentation des congés payés, hausse des salaires et des minimas sociaux, droit au logement (véritablement opposable), taxation des hauts revenus et des dividendes, gratuité des transports publics, 100 % de bio et de local dans les cantines scolaires désormais gratuites, sécurité sociale alimentaire… sans aller immédiatement jusqu’à la socialisation complète des moyens de production (quoique), les revendications ne manquent pas pour notre classe sociale.
Historiquement nous n’avons conquis que ce pour quoi nous nous sommes battu·es, y compris en 1936. La séquence qui s’ouvre nous offre l’opportunité d’un grand « coup de barre à gauche ». Face à un centre désavoué et une extrême droite qui n’a pu longtemps cacher son vrai visage, il nous faut porter haut des valeurs de solidarité de classe, progressistes et inclusives face au camp réactionnaire. Et c’est en premier lieu au sein des syndicats que nous pouvons mener ce combat, d’où l’importance de s’investir syndicalement et de porter des revendications de classe face aux intérêts capitalistes.
Pour le communisme et l’autogestion
Si le vote RN est marqué par l’adhésion à des idées racistes, il ne faut pas essentialiser les électeurs et électrices séduit·es par ces idées. Ils et elles ne font qu’exprimer le racisme systémique qui est celui en premier lieu promu par l’État et le système capitaliste que l’extrême droite instrumentalise à des fins partisanes. À cette lecture « ethnoraciale » des rapports sociaux, qui est celle des électeurs et électrices du RN, nous devons opposer notre grille de lecture classiste et solidaire. Ce discours qui est de moins en moins porté par nos organisations dans des territoires où nous sommes de plus en plus absents… et où le RN, malgré sa faiblesse militante, est lui présent. Le recul de ces idées, qui ne se fera pas du jour au lendemain, ne pourra se faire sans pointer du doigt les principaux producteurs de ce racisme : à savoir l’État ainsi que la bourgeoisie au plan national comme international au travers de leurs intérêts impérialistes.
Maintenant on s’organise
Dans cette période, il s’agit pour nous, militant·es communistes libertaires, d’agir au sein de nos contres-pouvoirs et d’être moteurs de la construction à venir des mouvements sociaux,car sans luttes collectives, il n’existe pas d’alternative révolutionnaire et autogestionnaire possible. Rien n’a été gagné si ce n’est un temps de répit, il faut donc en tant que militant·es poli-tique inviter à la lutte, certes, mais aussi réinvestir le terrain politique, syndical et social : appeler à réinvestir les outils de politisation de masse que sont les syndicats, les organisations politiques et les associations, (re-)faire du lien et (re-)tisser du lien social.Au niveau syndical ça veut dire investir les union locales et créer partout à c’est possible des VISA(Vigilances et Initiatives Syndicales Antifascistes) locaux pour mener le travail antifasciste de terrain.
Au niveau social et local ce travail sera essentiel dans la période à venir et il doit se faire en lien avec les organisations et les luttes antiracistes, féministes, LGBTI et internationalistes. Enfin les ruralités et leurs revendications ne doivent pas être ignorées. Les luttes écologistes et contre les grands projets inutiles, lieux de politisation et de rencontre entre différentes univers sociaux doivent aussi être privilégiées dans la période à venir. Nous sommes peut-être à un moment de rupture révolutionnaire, anticapitaliste et autogestionnaire. L’exaspération contre ce système ne fera que monter, mais peut donner des orientations diverses : une réaction conservatrice et fascistoïde ou bien l’aspiration à un changement révolutionnaire qui passerait par la socialisation et l’autogestion. Rien n’est écrit par avance, mais nos actions concrètes doivent se porter à construire un mouvement social fort, offensif et indépendant des calendriers politiques.
David (UCL Savoies)
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L'#UnionCommunisteLibertaire appelle à rejoindre ce rassemblement contre la #transphobie et les #feminicides demain à 18h pl. J. Jaurès à #Tours.
Justice pour Geraldine et Angelina : en hommage aux deux femmes trans victimes de féminicide, l'une de la main de son compagnon, l'autre, TDS de celle d'un client.
#AlternativeLibertaire de juillet (n°351) est en kiosque
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Lisez le témoignage de Brahim Metiba
politis.fr/articles/2024/07/ca…
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Et organisez-vous !
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Contre-offensive trans à Grenoble : Une première journée de mobilisation prometteuse
En réaction aux offensives législatives visant à interdire aux mineur·es trans l’accès à leurs traitements et aux offensives médiatiques à la suite de la sortie de Transmania, des rassemblements et manifestations ont été organisés partout en France. À Grenoble, ce dimanche 5 mai, la mobilisation fut un succès et s’annonce de très bon augure pour la suite !
Dimanche 5 mai 2024, en relais de l’appel national lancé par les Inverti·e·s et Du Pain et des Roses (DPDR, collectif féministe et LGBTI associé à Révolution permanente), quatres associations grenobloises d’auto-support aux personnes trans ont invité à un rassemblement pour une contre-offensive trans suivi d’une assemblée générale dont l’objectif était de structurer localement la lutte contre ces lois transphobes. 1000 personnes étaient présentes au rassemblement. C’est le plus gros événement spécifique aux luttes trans que la ville ai jamais connue ! L’ambiance y était combative et dynamique, il y avait beaucoup de jeunes. À ajouter à l’important nombre de personnes présentes, une autre victoire de ce rassemblement se trouve dans l’ensemble des forces de gauche présentes.
Un rassemblement de l’ensemble de la gauche
En effet, des autonomes aux partis politiques, en passant par des associations, quasiment l’ensemble des forces de gauche grenobloises étaient présentes. Nous regrettons cependant une apparition syndicale faible, Solidaires 38 n’étant pas au rendez vous. La CGT quand à elle, était présente au travers de son groupe jeune. S’en est suivie une Assemblée générale ouverte à toutes et tous. L’objectif de cette réunion était de s’outiller collectivement afin d’agir contre la désinformation transphobe et dans le même temps de structurer cette lutte autour de la création d’un cadre organisationnel.
Quelle intervention pour les communistes libertaires ?
Il y a des divergences au sein de l’AG quant au mode d’organisation à adopter pour ce cadre. Les jeunes sans expériences militantes peuvent être attiré·es par des stratégies autonomes, c’est-à-dire faire des actions minoritaires en groupes affinitaires. Nous avons davantage poussé vers des lignes unitaires les plus larges possibles, tout en assurant aux personnes trans leur rôle central dans la lutte qui s’annonce : pour gagner, nous aurons besoin d’être nombreuses et nombreux ! Nous poussons également l’assemblée générale à se structurer politiquement. Nous verrons à l’avenir sous quelle forme elle souhaite s’organiser. Une inter-orga ? Un nouveau collectif ? On suit ça de près ! Au fédéral, des camarades de la commission antipatriarcat ont été mandatées pour participer à la construction du cadre inter-organisation national pour appeler à la mobilisation de façon large.
Si des tensions existent au sein de celui-ci à cause des différences stratégiques entre les organisations et associations, nous continuons de penser qu’il est le plus pertinent : il est urgent de s’allier contre la menace transphobe.
Commission antipatriarcat de l’UCL
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Elsa Beck Marsault : Abolitionnisme carcéral, Faire justice
Rester à l’écart des systèmes judiciaire et policier pour traiter les violences sexistes en milieu militant, c’est parfois une obligation, souvent un objectif. Ce livre, ancré dans une longue expérience dans des communautés queer, pose une mise en garde contre les dérives que cela peut entraîner, et propose des alternatives, sans jamais laisser de côté l’impératif de soin et de protection des victimes.
« En tant que gouine, j’ai longtemps navigué dans les communautés queer et féministes, et ai été témoin de nombreux processus d’exclusion et d’acharnement collectif – sur les protagonistes d’un conflit politique, sur des personnes victimes comme autrices de violence, ou sur leur entourage. »
La première phrase annonce parfaitement le sujet du livre : Faire justice est une réflexion sur la façon de gérer les conflits graves qui surgissent entre personnes qui se connaissent ou qui fréquentent un même lieu, en dehors de tout recours à la police ou à la justice.
Faire justice ou se venger ?
L’autrice, Elsa Deck Marsault (EDM) est la cofondatrice de Fracas, un collectif queer et féministe d’entraide militante à la prise en charge des conflits et des violences en milieu intracommunautaire.
Commençons par un rappel : la justice punitive, celle sur laquelle se fonde notre système pénal, est basée sur le principe : « un acte = une sanction ». Ce principe s’appuie sur la croyance selon laquelle la punition est juste et nécessaire. Croyance tellement ancrée qu’elle perdure même dans les milieux qui décident, par idéologie ou par nécessité, de se passer de la justice étatique pour régler les conflits internes. Le risque est gros : sans recul sur ce que l’on perçoit a priori comme « juste », on finit par se retrouver en position de « se faire justice », et c’est parfois un peu moche. Passages à tabac, harcèlement, mise en place de processus d’exclusion définitive sans regard sur les conséquences psychologiques que cela peut induire... EDM parle avec une grande justesse du malaise qui l’a saisie parfois au moment de prendre part à de telles actions, qu’elle estimait pourtant extrêmement justifiées. Mais en elle quelque chose résiste : comment se satisfaire d’un processus qui aboutit à traiter une personne comme si elle n’avait plus aucun droit humain, alors que l’on milite pour un monde plus égalitaire ?
Changement de paradigme
Le livre déroule l’analyse de nombreuses pratiques, par exemple le call out. Il s’agit de dénoncer les agissements d’une personne de façon publique, ce qui a tout son sens quand il s’agit d’une personne à la réputation bien établie, affirme EDM. Crier le plus fort possible les actes qu’ont commis Polanski, Depardieu et leurs compères, est très légitime, le but étant de leur faire perdre l’aura sur laquelle ils s’appuient pour agresser, et de contester les honneurs dont on les couvre. Mais dans le cas d’un·e « inconnu·e », le procédé perd de sa pertinence. D’autant que parfois le collectif de lutte est aussi un espace de vie ; pour une personne queer en rupture avec sa famille par exemple, le groupe est l’endroit où se développent des relations essentielles à la survie psychique et parfois physique... EDM rapporte avoir été témoin de cas de personnes perdant absolument tout suite à un call out : les ami·es, le lieu de vie, le travail.
Alors que faire ? Se pencher sur les principes de la justice transformatrice !
Cette justice-là est fondée sur le constat que punir une personne en raison de son comportement n’a que très peu de chance de l’inciter à changer. Et sur l’idée que les conflits interpersonnels ne sont pas sans lien avec les dynamiques de groupe, qui sont toujours à questionner. L’enjeu est d’encadrer l’émergence d’une prise de conscience de l’agresseur, tout en soutenant la victime, et en interrogeant les éléments extérieurs qui ont permis ou favorisé le passage à l’acte.
Trois étapes sont nécessaires pour transformer nos pratiques : s’intéresser au sujet d’abord, se documenter sérieusement avant d’agir. Prendre du recul sur nos usages et nos motivations, car se lancer dans l’accompagnement de personnes ayant subi ou commis des violences nécessite un investissement de long terme émotionnellement fort et n’est jamais sans conséquence. Enfin, s’organiser !
C’est souvent coûteux, parfois infructueux, mais EDM nous l’affirme, forte de son expérience au sein de Fracas : cela permet de s’attaquer à la résolution de situations humainement problématiques en ré-affirmant la possibilité de l’humain d’évoluer. Pas anodin si l’on vise à transformer la société !
Mélanie (amie d’AL)
Elsa Deck Marsault, Faire justice. Moralisme progressiste et pratiques punitives dans la lutte contre les violences sexistes, La Fabrique, septembre 2023, 168 pages, 13 euros
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Lire Harsha Walia : Migrations, capitalisme et nationalisme
Avec ce panorama mondial du contrôle de la main-d’œuvre par les frontières, la militante Harsha Walia, cofondatrice du groupe de défense des droits des migrants No One is Illegal, bouscule les récits dominants sur la « crise migratoire ».
Résultat inévitable de la colonisation, de la mondialisation capitaliste et des dérèglements climatiques, elle explique comment les migrations sont criminalisées, en même temps qu’elles renforcent les discours racistes, afin de garantir l’accumulation du capital.
Elle revient sur la formation de la frontière avec le Mexique, justifiée dès l’origine par l’idéologie de la destinée manifeste, puis l’annexion forcée de la moitié du pays, les guerres indiennes, qui ont servi de modèle aux guerres génocidaires, la surveillance et le contrôle de la population noire au service des intérêts du suprémacisme blanc et du capitalisme racial, la continuité entre le développement du complexe carcéro-industriel et les opérations de contre-insurrection, les accords de libre-échange, véritable contre-histoire des États-Unis.
La politique d’externalisation de la frontière, mise en place par l’Australie, est devenue un modèle mondial, notamment pour « l’Europe forteresse » : « La doctrine de la dissuasion exige une hécatombe aux frontières pour susciter la peur et prévenir la migration. » Le système de la kafala, qui régit le travail des travailleurs migrants dans les pays du golfe Persique, est un régime de citoyenneté exclusif et de ségrégation légale, comme un détournement de la conscience de classe au profit de la conscience nationaliste. Il s’agit bien de défendre le dogme de la citoyenneté raciale, ce que faisait déjà le Programme des travailleurs étrangers temporaires mis en place au Canada à la fin du xixe siècle, et que font tous les gouvernements d’extrême droite de la planète, dont le point commun est l’islamophobie.
Cette étude quasi-exhaustive donne à comprendre l’immigration dans sa dimension systémique et historique.
Ernest London (UCL Le Puy-en-Velay)
Harsha Walia, Frontières et domination. Migrations, capitalisme et nationalisme, Lux, 2023, 408 pages, 23 euros
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Contre le péril fasciste, réinventons l’espoir
Le sursaut électoral antifasciste a privé l’extrême droite d’une majorité. C’est un sursaut pour un sursis. La mobilisation populaire pour faire barrage in extremis doit se prolonger durablement pour reconstruire les outils politiques, syndicaux et associatifs de l’émancipation de notre classe sociale, celle des travailleurs et travailleuses. Nous ne ferons reculer l’extrême droite qu’en reconstruisant un projet politique désirable d’égalité et de justice.
Sous le parrainage du milliardaire catholique conservateur Vincent Bolloré et de son empire médiatique (Canal+, Cnews, Journal du dimanche, Paris-Match, Europe 1…) s’est réalisée l’union du RN avec Les Républicains de Ciotti. Alliance qui permet aux fachos de multiplier par deux leurs électeurs et d’augmenter dangereusement le nombre de leurs députés. A cela s’ajoute que Bardella a pris la direction au Parlement européen des députés d’extrême droite favorables à Poutine.
La dynamique du RN libère dans la rue et dans les entreprises les agressions physiques et verbales racistes, homophobes, transphobes… Troisième force politique à l’Assemblée mais premier parti politique, le RN va pouvoir renforcer d’ici la présidentielle de 2027 son discours « anti-système », le « seul parti qu’on a pas encore essayé ». Le péril reste entier.
Un Parlement sans majorité
La cuisine parlementaire est en ébullition. La démocratie bourgeoise où les élu·es sont hors de contrôle est en panne. Quel que soit le menu qui nous sera servi, il ne saura satisfaire les revendications sociales, économiques, écologiques et antiracistes urgentes. Et il ne répondra pas plus aux aspirations d’égalité et de justice des femmes, des quartiers populaires, des minorités LGBTI. Au mieux pouvons nous espérer que les compromis inévitables entre les trois blocs freinent les attaques contre le camps des jeunes et des travailleurs et travailleuses.
Retrouver le goût du combat politique
Le « peuple de gauche » a subit tant de déceptions, du stalinisme au social-libéralisme, qu’il s’est progressivement mais massivement replié sur lui-même, abandonnant le terrain à un macronisme « en même temps » de gauche et droite, et laissant prospérer les idées réactionnaires les plus sombres.
Face aux médias Bolloré et aux militants d’extrême droite galvanisés, il s’est réveillé, un peu en panique. Il faut que ce réveil soit le point de départ d’une reconquête et d’une reconstruction. Reconquête idéologique contre le fatalisme économique que nous assène le capitalisme ultralibéral, reconstruction des outils de nos résistances.
Paniques morales quant au péril sur l’« identité française »
Si le vote à l’extrême droite peut s’expliquer en partie par la crise du capitalisme et des politiques néolibérales mises en place depuis des décennies, nous devons faire face à l’adhésion toujours plus grande de notre camp social aux idées racistes et aux paniques morales quant au péril sur l’« identité française » qui serait menacée par des Français·es d’origine étrangère ou binationaux, ou encore des migrant·es vu·es comme des « ennemis de l’intérieur ». L’extrême droite en fait son carburant, mais il faut mesurer la responsabilité de l’État et des décennies de politiques racistes et coloniales, de stigmatisations et de discriminations à droite comme à gauche, au nom de prétendues « valeurs républicaines ». Combattre l’extrême droite c’est la couper là où elle prend racine.
Face au péril fasciste et à une classe capitaliste jamais rassasiée, il faut reconstruire nos syndicats et nos capacités à mener des grèves sérieuses. Reconstruire ou étendre nos comités de quartiers, les associations féministes, antiracistes, écologistes sur des bases combatives pouvant organiser des actions à la fois radicales et massives.
Rendre le communisme à nouveau désirable
Le Nouveau Front populaire, s’il perdure, ne sera pas l’outil du renouveau. La social-démocratie n’ira pas au bout de ses promesses et ne saura pas répondre à la hauteur de l’enjeu. Il faut passer d’un anticapitalisme trop souvent réduit à de vagues slogans à une défense forte du communisme comme seule alternative crédible à la mondialisation capitaliste et aux guerres entre puissances impérialistes majeures qui nous menacent – comme en Ukraine – et maintiennent les peuples dans la misère et sous domination – comme à Mayotte, en Kanaky ou en Palestine.
Fidèles à leur traditions, ancré·es dans les organisations populaires et dans les luttes, les communistes libertaires doivent plus que jamais porter haut leur projet de société : socialisation des moyens de production et autogestion de la société avec les outils de la démocratie directe.
Union communiste libertaire, 8 juillet 2024
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Irak : Opération turque de grande envergure contre la gauche kurde
C’est reparti pour une campagne de bombardements et de mort. Début juillet, Erdogan a lancé son armée dans les montagnes irakiennes pour traquer la guérilla qui le défie. En parallèle, il tente de se rabibocher avec un autre tyran sanguinaire, Bachar el-Assad.
Depuis la fin du mois de juin, au moins 300 véhicules blindés, dont des chars, et 15 000 soldats turcs ont pénétré au Kurdistan irakien. Dans les monts Qandil se trouve en effet la base arrière du PKK, centre de gravité de la gauche kurde au Moyen-Orient, qu’Erdogan a promis de détruire pendant l’été. Pour atteindre cet objectif, il a l’appui en Irak du Parti démocratique du Kurdistan (PDK), la faction « libérale-féodale » du clan Barzani. Mais il multiplie aussi les initiatives diplomatiques.
Erdogan a coutume de galvaniser le nationalisme en Turquie avec des opérations militaires extérieures chaque fois que son autorité vacille à l’intérieur. Ce qui est le cas suite au succès de l’opposition, et notamment de la gauche kurde, aux dernières élections municipales.
Mais cette opération constitue également une pression globale sur la gauche kurde en Turquie, en Irak et en Syrie. Malgré leurs chicanes, les différents régimes d’extrême droite qui tyrannisent la Turquie, l’Iran, l’Irak et la Syrie ont au moins un point commun : la haine des forces de gauche et de l’expérience révolutionnaire qui se mène Rojava.
La Russie semble s’entremettre
En Syrie, justement, Erdogan tend la main à Bachar el-Assad. Le 28 juin, il a déclaré qu’il ne voyait « aucun obstacle au rétablissement des relations avec la Syrie », dont l’armée turque occupe plusieurs régions, où elle couvre des milices islamistes voire djihadistes. Mais Assad a lui-même affirmé le 26 juin être ouvert à « toutes les initiatives concernant les relations syro-turques ». Fin mai, le Premier ministre irakien a déclaré qu’il œuvrait pour la réconciliation entre Ankara et Damas, mais c’est surtout la Russie qui semble s’entremettre.
Il reste cependant un fossé entre les exigences syriennes et turques. Assad veut le retrait des troupes turques et l’arrêt du soutien d’Ankara aux milices djihadistes. La Turquie exige avant tout que Damas élimine l’Administration autonome du nord et de l’est de la Syrie (AANES) dominée par la gauche kurde. Aucun ne veut jouer le premier coup.
Si le gouvernement irakien et le PDK ont donné leur feu vert à une intervention militaire turque au Kurdistan d’Irak, c’est probablement en raison des enjeux d’infrastructures, notamment pétrolières, qui pour l’heure sont gênés par l’activité de la guérilla kurde.
L’État français sera encore plus complice avec le RN au pouvoir
L’État français, de son côté, n’exerce plus aucune pression sur la Turquie pour une solution pacifique au Kurdistan. Pire : pour complaire à Erdogan, il réprime épisodiquement les militants de la diaspora kurde en France.
Cette politique cynique pourrait s’aggraver avec l’arrivée au pouvoir du Rassemblement national, dont la sympathie va généralement aux dictateurs, qu’il s’agisse d’Erdogan, d’Assad, de Poutine.
« Les actions de soutien militantes en France et à l’étranger sont d’une importance vitale, a rappelé récemment le représentant de l’Administration autonome du nord et de l’est de la Syrie (AANES). Cela génère aussi beaucoup d’espoir sur place. » Même s’il est évident qu’en France la priorité est à la lutte contre l’extrême droite, nos camarades révolutionnaires qui combattent l’extrême droite au pouvoir en Turquie, en Iran et en Syrie doivent continuer à recevoir notre soutien. De nombreuses initiatives sont portées par le réseau Serhildan, la Coordination nationale solidarité Kurdistan ou encore le réseau Rise Up For Rojava.
Union communiste libertaire, le 2 juillet 2024
www.unioncommunistelibertaire.org/?Contre-la-montee-de-l-extreme-droite-lutte-des-classes-et-revolution-sociale
Contre la montée de l’extrême droite - lutte des classes et révolution sociale !
Les élections européennes sont passées. Partout en Europe, les conservateurs et l’extrême droite ont réalisé les scores prévus par les instituts de sondage. L’extrême droite est désormais en position de force, grâce notamment aux scores obtenus en France et en Allemagne. Il n’y a pas d’autre choix que de reconnaître que nous sommes confrontés à un avenir de crise qui pourrait avoir les conséquences les plus graves. Nous devons nous y préparer et nous devons le faire maintenant.
Les élections européennes sont passées. Partout en Europe, les conservateurs et l’extrême droite ont réalisé les scores prévus par les instituts de sondage. L’extrême droite est désormais en position de force, grâce notamment aux scores obtenus en France et en Allemagne, ce qui lui permettra soit de former une alliance avec le groupe conservateur du PPE (dont elle a déjà fortement influencé les politiques très à droite), soit d’agir comme une force de blocage contre les politiques sociales et progressistes. Il n’est pas difficile de prévoir que les politiques européennes à venir seront encore plus dures pour les classes laborieuses et les migrants.
Un avertissement pour notre camp social
Ce vote pour les ennemis du travail et les amis du grand capital - bien que minoritaire au vu du taux d’abstention - est un avertissement pour notre camp social. Il est la conséquence directe des politiques d’austérité budgétaire - la destruction des services publics, la remise en cause des droits sociaux et notamment de la protection sociale, alors que la bourgeoisie s’enrichit infiniment - et des politiques de libéralisation promues par l’Union européenne.
Même si les forces d’extrême droite ne sont pas encore sur le point de prendre le pouvoir dans toute l’Europe, les résultats des élections montrent plus que clairement que la démocratie libérale, contrairement à ce qu’elle et ses partisans aiment à présenter, n’offre aucune protection contre l’extrême droite. Par sa politique d’appauvrissement de la classe ouvrière et ses politiques nationalistes, racistes, sexistes, homophobes et transphobes qui sèment la discorde, elle crée un terrain fertile pour la montée de l’extrême droite. Par ses élections, il hisse l’extrême droite au pouvoir et lui donne les moyens de mettre en œuvre ses projets.
Le vote d’extrême droite est l’expression d’un racisme structurel
Il n’y a pas d’autre solution que de reconnaître que nous sommes confrontés à un avenir de crise qui pourrait avoir les conséquences les plus graves. Nous devons nous y préparer et nous devons le faire maintenant. Mais si le vote d’extrême droite est alimenté par le désespoir dans un contexte où nos acquis sociaux sont constamment attaqués et érodés, s’il est l’expression d’un racisme structurel qui, dans un contexte de crise, s’exprime de manière décomplexée, alors il n’est pas inéluctable. Notre camp social doit se rassembler pour mener une contre-offensive. C’est en luttant collectivement pour la reconquête des droits, sur une base de classe, que nous ferons reculer durablement l’extrême droite. Seul un mouvement social fort, autonome, offensif et pleinement antiraciste sera en mesure de faire reculer l’extrême droite sur le long terme.
Face à la haine et à la division érigées en système, opposons la solidarité de classe de tous les travailleur·euses, y compris les personnes racisées, les jeunes des quartiers populaires, les personnes LGBTI et les femmes, qui seront les premières victimes de l’extrême droite lorsqu’elle arrivera au pouvoir. Partout où nous rencontrons une résistance de l’extrême droite, nous devons toujours montrer pour quelle alternative nous nous battons. Notre perspective n’est pas la démocratie libérale, notre perspective est la lutte unie pour les intérêts de notre classe, la construction d’un contre-pouvoir et la révolution sociale.
Pour construire cette alternative - dans les syndicats, les organisations de quartier, les groupes scolaires et universitaires, les collectifs féministes, antiracistes et écologistes - nous devons gagner nos collègues, nos voisin·nes, nos camarades de classe.
Arrêtons la montée de l’extrême droite ! Luttons pour la révolution sociale !
Union communiste libertaire (UCL) - France, Belgique, Suisse
Die Plattform - Allemagne
Embat, Organització Llibertària de Catalunya - Catalogne, Espagne
Organisation Socialiste Libertaire (OSL) - Suisse
Anarchist Communist Group (ACG) - Grande Bretagne
Alternativa Libertaria (AL) - Italie
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Constitutionnalisation de l’IVG : Qu’en est-il vraiment de nos droits ?
La constitutionnalisation de l’IVG en France a été saluée partout dans le monde comme un vote « pionnier ». Et pourtant, elle est fruit d’un compromis politique qui ne garantit en rien les conditions d’accès à l’avortement ou les conditions dans lesquelles se déroule celui-ci. Un pis-aller pour les femmes et un refus de protéger toutes les autres personnes concernées par ce droit.
Le 4 mars, le Parlement réuni en Congrès à Versailles a approuvé le projet de loi constitutionnelle relatif à la liberté de recourir à l’avortement. Cette loi vient insérer dans l’article 34 de la Constitution un alinéa rédigé ainsi :« La loi détermine les conditions dans lesquelles s’exerce la liberté garantie à la femme d’avoir recours à une interruption volontaire de grossesse ». Le gouvernement a retenu la « liberté » du Sénat au « droit » de l’Assemblée, en lui ajoutant toutefois une « garantie » qui pourrait paraître plus sécurisante. Mais Éric Dupond-Moretti s’est empressé de préciser que le gouvernement n’entendait pas créer un droit absolu et sans limite. Que la réaction se rassure, ce terme ne remet pas du tout en cause le délai légal de l’avortement ou la clause de conscience des médecins et des sages-femmes ! La Commission nationale consultative des droits de l’Homme a d’ailleurs souligné que ce texte n’apportait rien par rapport à la situation actuelle.
Une avancée ? Mais laquelle ?
Sarah Durocher, présidente du Planning familial, considère que faire avancer le droit à l’avortement implique toujours des compromis en France, qu’il fallait que les anti-choix perdent et qu’il était important d’envoyer un signal aux féministes européennes dans un contexte où l’extrême droite et la droite conservatrice arrivent au pouvoir. Certes, mais il n’en demeure pas moins que la formulation retenue par le gouvernement exclut les hommes trans de l’accès à l’IVG, car il est bien évidemment possible d’être enceint sans être une femme, que l’on soit un homme intersexe, un homme trans ou une personne étrangère bénéficiant d’une mention de sexe « neutre » ou « autre » à l’état civil [1].
Cette « avancée » ne supprime en rien les obstacles rencontrés par bon nombre de femmes : fermeture de Centres de constraception et d’interruption volontaire de grossesse (CIVG), hostilité ou désintérêt de certains médecins, freins à la pratique des IVG par les sages-femmes, ... De plus, si l’extrême droite accède au pouvoir, cette constitutionnalisation ne l’empêchera pas de faire voter une loi rajoutant par exemple des entretiens préalables, coupant les remboursements ou empêchant les mineures d’avorter sans autorisation parentale.
Se réjouir d’un symbole ? Sûrement pas !
Nous ne pourrons jamais compter sur des politiques qui depuis des décennies pavent la voie aux réactionnaires et à l’extrême droite. Pendant que les macronistes jouent aux féministes, l’extrême droite continue sa propagande. La chaîne réactionnaire de Vincent Bolloré, CNews, a qualifié l’avortement de première cause de mortalité dans le monde, assimilant les avortées à des meurtrières. Ce gouvernement comme d’autres ne fait qu’utiliser les droits des femmes et des personnes LGBTI pour redorer son blason alors qu’il détruit les services publics, annonce le réarmement démographique et mène des politiques coloniales de contrôle démographique comme à Mayotte où il incite les femmes à se faire stériliser. Nous ne pouvons pas nous réjouir d’un symbole qui masque le manque abyssal de moyens alloués au respect du droit à l’avortement. Selon sa situation géographique, mais aussi sociale, une personne souhaitant avorter peut rencontrer de grandes difficultés pour faire ses démarches dans les délais légaux. Le démantèlement de l’hôpital public où se fait la majorité des IVG, la fermeture de 130 CIVG en 15 ans, ou encore la « clause de conscience » qui permet toujours aux médecins de refuser cet acte médical sont autant d’obstacles matériels à la possibilité d’avorter.
Pour un avortement libre et gratuit, partout, tout le temps
Dans les pays autorisant l’avortement, la bataille se situe inlassablement autour des moyens alloués (information, lieux pour avorter, médecins formés, prise en charge financière, etc.) afin que le droit à avorter devienne enfin effectif pour toutes et tous. En plus de cette effectivité, c’est aussi la gratuité que nous devons gagner. L’assurance maladie devrait couvrir les avortements chirurgicaux et médicaux comme la contraception. La santé sexuelle et reproductive a évidemment un coût que nous pouvons choisir d’assumer collectivement. De telles mesures permettraient aux femmes et aux personnes issues de minorités de genre d’avorter dans leur pays de résidence et gommeraient les inégalités d’accès entre les individu·es de différents milieux.
Nous voulons voir disparaître les situations de discrimination et les obstacles pour accéder à l’avortement pour toutes les femmes éloignées des systèmes d’information et de soin, les membres des groupes minoritaires et marginalisés, comme les personnes racisées, les membres des communautés LGBTI et les plus jeunes. Ainsi, se pose également la question de l’allongement des délais (24 semaines aux Pays-bas par exemple), ou de leur suppression comme au Canada où l’avortement est légal à tous les stades de la grossesse.
Les discours infantilisants doivent cesser. Les femmes comme les personnes en minorité de genre n’ont pas besoin de lois pour savoir à quel moment elles peuvent ou pas avorter. Nous savons ce qui est bon pour nous. Nous n’avons pas besoin de législateurs décidant à notre place (et sans qu’aucune raison médicale ne vienne appuyer tel ou tel délai) pour des questions morales, religieuses ou philosophiques. Le droit à choisir librement sa grossesse est une liberté fondamentale. Il en va de même pour tous les droits à disposer de son corps, de la transition médicamenteuse au refus des mutilations des personnes intersexes. Pour toutes les femmes, et personnes en minorité de genre du monde entier, la lutte continue.
Commission antipatriarcat de l’UCL
[1] Le Planning Familial avait subi de nombreuses attaques en 2022 à la suite de la publication d’une affiche montrant un homme trans enceint. Voir le communiqué de soutien que nous avions produit à l’époque : unioncommunistelibertaire.org/…
Planning familial : Faire front face aux attaques transphobes – UCL - Union communiste libertaire
Une nouvelle polémique transphobe frappe le planning familial et menace nos droits reproductifs et sexuels à toutes et tous.UCL - Union communiste libertaire