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10 milliards d’euros d’économies : Saigner les services publics au profit des vampires capitalistes
À la mi-février, Bruno Le Maire annonçait en direct sur TF1, dix milliards d’économies « sur l’État, pas sur les Français ». Traduction de cette novlangue néolibérale : ce sont les services publics protecteurs qui subiront la saignée, les bourgeois et leurs chiens de garde seront épargnés par les économies. Mais à propos, dix milliards d’économies ça représente quoi exactement ?
Le 21 décembre dernier était adopté à l’Assemblée nationale, après le rejet d’une énième motion de censure de la gauche, le budget de l’État pour 2024. Pour faire passer sans vote ce budget et celui de la Sécurité sociale, adopté début décembre, le gouvernement a usé, jusqu’à la corde, du fameux article 49.3... à dix reprises ! Mais il faut dire que le jeu en valait la chandelle puisqu’il ne s’agissait pas moins selon Élisabeth Borne, alors Première ministre, que de défendre la création « de plus de 2 000 postes de policiers et gendarmes, une hausse des moyens de la justice et de la défense, des revalorisations pour les enseignants et un “budget vert” avec sept milliards d’euros supplémentaires en faveur de la transition écologique » [1]. Ce budget était construit sur une prévision de croissance (comme on dirait dans Les Échos) de 1,4%, c’est du moins le chiffre qui avait été présenté par le Ministère de la sauvegarde des intérêts de la bourgeoisie, également appelé Ministère de l’économie et des finances. Peu importe que ces estimations soient clairement en décalage avec ce que les organismes internationaux prévoyaient pour la France, l’important c’était de nous vendre du rêve de croissance.
Une fois le budget voté il allait falloir assurer le rétropédalage, parce qu’en fait les estimations de croissances sont maintenant estimées à 1% du PIB. Peut importe, Bruno Le Maire se charge de l’annonce au JT de 20 heures de TF1 en mode « la croissanse ralentit partout dans le monde […] cela a un impact sur la croissance française », mais droit dans ses bottes il assure que « la croissance française résiste mieux que les autres grands pays développés » et surtout que rien ne serait « demandé aux français », ce qu’il faut traduire par : pas de hausse d’impôts pour les plus riches –, et que les économies seront faites « exclusivement sur le budget de l’État », ce qu’il faut traduire par : on ne demandera rien aux entreprises. Résultat : 10 milliards d’économies en 2024 et 20 milliards en 2025 à trouver majoritairement dans les budgets de l’écologie, de la santé, du social et de l’éducation.
690 millions d’euros sur le budget de l’Éducation nationale
Si les chiffres sont impressionnants ils restent finalement peu parlants tant on peine à incarner ces sommes dont il est difficile de saisir la matérialité. Le collectif Nos services publics [2], un collectif de fonctionnaires ayant notamment pour but de « mettre au jour et agir contre les dysfonctionnements institutionnalisés de nos administrations », a décortiqué le décret publié le 22 février « détaillant les mesures d’économies budgétaires ». Reprenant les données du gouvernement secteur par secteur il permet de voir concrètement ce que 10 milliards d’économies essentiellement supportées par des secteurs indispensables aux classes populaires.
La plus grosse part des économies sera faite sur les politiques « écologie, développement et mobilité durables », 2 milliards 460 millions. Logique quand on connaît la gravité de la crise environnementale ! 1 milliard d’économies sur le plan de rénovation énergétique ça correspond concrètement à renoncer à rénover entre 100 000 et 150 000 habitations, ce qui représente le nombre de logements d’une ville comme Rennes ou Lille. Sachant que selon l’Observatoire de la précarité énergétique, « 26% des ménages ont souffert du froid chez eux au cours de l’hiver 2022-2023 » [3], les familles monoparentales et les familles nombreuses sont les premières concernées. Autre économie sur les politiques écologiques : 500 millions de réduction du Fond d’accélération de la transition écologique dans les territoires (dit « Fond vert ») ce qui représente la non-rénovation de 48 collèges (mais rassurons-nous à Stanislas ou à l’École alsacienne tout va bien !).
Les forces de l’« ordre » épargnées par les économies
Deuxième secteur particulièrement ciblé par ces économies qui ne « touchent pas les français », l’enseignement et la recherche qui devront participer à hauteur d’1 milliard 590 millions d’euros ! Concernant l’enseignement les 690 millions d’euros d’économies ça représente concrètement l’équivalent de la suppression de 436 écoles primaires, 54 collèges et la fin de l’accompagnement de 14 000 élèves en situation de handicap ! Pour rappel entre les budgets 2023 et 2024, le financement, par nos impôts, de l’enseignement privé, financé à 75% par des fonds publics, est passé de 8 milliards 468 millions à 9 milliards 35 millions. Comme quoi en cherchant bien on aurait pu trouver des marges d’économie ! La recherche est elle aussi saignée avec une baisse de 900 millions d’euros de son budget, ce qui représente concrètement, au choix : la suppression du financement de 1500 projets de recherche ou bien la suppression d’un tiers des cours pour chaque étudiant·e inscrit·e en licence.
Par contre on ne demande que 232 millions d’euros d’économies à la Sécurité (police et armée), gageons que les plus de 78 millions d’euros d’achats de grenades de « maintien de l’ordre » [4], la plus grande commande en plus de dix ans, ne seront sans doute pas impactés par les économies.
S’attaquer aux services publics c’est s’attaquer aux plus précaires
Tandis que les revenus du capital augmentent sans commune mesure avec ceux du travail [5], c’est donc bien sur les couches populaires que pèseront les « efforts » et pendant ce temps là on ne touche pas aux véritables assistés : les capitalistes. Le « soutien à l’économie » ne verra son budget grévé que de 220 millions, ce qui n’est rien rapporté à l’ensemble des aides aux entreprises qui étaient de plus de 157 milliards en 2019, soit « l’équivalent de 6,4% du PIB (8,5% si l’on ajoute les niches déclassées) ou encore de plus de 30% du budget de l’État (41% avec les déclassées) » [6] selon l’IRES (Institut de recherches économiques et sociale) [7]. En 2023, les revenus des plus grosses capitalisations du CAC 40 ont explosé : 153,6 milliards d’euros de profits, 67,8 milliards d’euros de dividendes versés et 30,1 milliards de rachats d’actions pour l’année 2023 [8], mais personne à Bercy n’a semble-t-il songé à aller gratter quelques milliards de ce côté-ci.
Les mesures d’« économies » sont justement ciblées sur les services qui bénéficient aux plus précaires d’entre-nous. Il nous faut défendre nos services publics contre l’État qui n’est que l’expression des intérêts des capitalistes. À ce titre le mouvement massif de grève reconductible qui touche les écoles du 93 depuis maintenant quatre semaines nous montre la voie. Sans résignation et avec détermination fonctionnaires et usagers et usagères des services publics devons défendre notre bien commun contre les « dysfonctionnements institutionnalisés de nos administrations » et leur privatisation. Rappelons-nous que quand tout sera privé, nous serons privé·es de tout !
David (UCL Savoies)
[1] « Le budget 2024 définitivement adopté par le Parlement », Le Monde, 21 décembre 2023.
[2] Voir leur site Nosservicespublics.fr.
[3] « Les chiffres clés de la précarité énergétique (édition mars 2023) », Onpe.org.
[4] « Maintien de l’ordre : la France s’offre plus de 78 millions d’euros de grenades », Politis, 10 novembre 2023.
[5] « Entre 2021 et 2022 le montant total des revenus déclarés par les redevables de l’IFI a augmenté de 31,7% chez les foyers imposés à l’IFI contre 5,7% chez les autres foyers » note l’Observatoire de la justice fiscale, « Qui paie l’impôt sur la fortune immobilière ? », Obs-justice-fiscale.attac.org, 3 février 2024.
[6] « Le coût exorbitant des aides aux entreprises », Alternatives économiques, 21 janvier 2023.
[7] Dans son rapport de mai 2022, Un capitalisme sous perfusion : Mesure, théories et effets macroéconomiques des aides publiques aux entreprises françaises, l’IRES rappelait à juste titre à propos des aides aux entreprises que « Christopher Howard proposait déjà en 1997 l’expression hidden welfare state, laquelle pourrait être actualisée en y ajoutant donc in favor of companies, soit littéralement “un État-providence caché en faveur des entreprises” », « Mesure, théories et effets macroéconomiques des aides publiques aux entreprises françaises », mai 2022, Ires.fr.
[8] « Des milliards d’euros de profits et de dividendes, une année record pour les entreprises du CAC 40 », Le Monde, 7 mars 2024.
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À la mi-février, Bruno Le Maire annonçait en direct sur TF1, dix milliards d'économies « sur l'État, pas sur les Français ». Traduction de cette novlangue néolibérale : ce sont les services publics…UCL - Union communiste libertaire
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Édito : No War But Class War
L’utilisation du terme « réarmement », à sept reprises, durant ses vœux de la Saint-Sylvestre par Emmanuel Macron n’était pas qu’un effet de style. C’était bien la marque d’une volonté de s’inscrire dans une narration guerrière.
Face à la contestation croissante de sa politique antisociale, Macron, sans majorité pour gouverner, cherche à endosser une posture régalienne. Si l’on peut contester le Président, on ne conteste pas le chef des Armées. C’est également une façon de fixer un électorat conservateur et nostalgique d’une grandeur passée. « Réarmement économique », « réarmement de l’État », « réarmement civique », « réarmement industriel » ou « réarmement de la Nation », ou encore « réarmement démographique », tout cela a un arrière-goût rance de vichysme. Tout autant que la « feuille de route » de Gabriel Attal qui fleure bon l’extrême droite comme l’évoque « la mise en œuvre du projet de réarmement et de régénération annoncé ».
Macron a encore franchi une étape depuis en laissant entendre que des troupes françaises pourraient être engagées sur le front ukrainien. Le Président se rêve en chef de guerre. Outre ses effets mobilisateurs, la guerre est un bon business, et la France ne s’en sort pas trop mal. Sur la période 2019-2023 elle devient le deuxième exportateur mondial d’armements devant la Russie. Une industrie fortement soutenue par l’État qui y affecte pas moins de 900 fonctionnaires !
Alors que la casse sociale se poursuit et s’accélère au nom de la maîtrise des déficits, nous devons refuser et dénoncer cette logique guerrière et mener la seule guerre qui vaille : la guerre sociale contre la bourgeoisie et ses valets.
UCL, 23 mars 2024
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Turquie : des fraudes massives pour étouffer la dissidence kurde 03/04
Des élections municipales du 31 mars 2024, on retiendra la déroute de l’AKP, le parti islamo-conservateur de Recep Tayyip Erdoğan. Dans les régions kurdes sous occupation militaire, les fraudes massives – observées par nos liens directs sur place – n’ont pas empêché la victoire du Dem Parti, le principal parti de la gauche kurde. L’État turc attaque à présent les résultats du scrutin, et la population descend dans la rue.
Au niveau national, c’est le CHP, le parti kémaliste historique (centre-gauche nationaliste) qui a chassé l’AKP de nombreuses mairies. Mais au Bakûr (Kurdistan de Turquie), c’est le Parti de l’égalité et de la démocratie des peuples (Dem Parti) qui s’impose en remportant dix provinces (contre huit en 2019) et 82 villes, soit 16 de plus qu’en 2019. Cette victoire aurait du être plus grande encore, trois provinces (Bitlis, Kars et Şırnak) ayant été perdues en raison des fraudes électorales orchestrées par le gouvernement AKP : des milliers de soldats ont été amenés en convois pour voter (souvent plusieurs fois) dans les villes du Kurdistan acquises au Dem Parti. Là, la pression du régime est la norme : des policiers et soldats en armes à proximité des isoloirs, des véhicules blindés dans l’enceinte des écoles où l’on vote, des pressions pour voter AKP contre un peu d’argent, ou sous la menace de perdre son emploi, etc.
Tous ces soldats sont stationnés dans les communes frontalières en raison de la guerre menée au Kurdistan d’Irak, mais leur répartition est organisée par l’État turc pour maintenir une pression constante sur toutes les provinces kurdes.
Dans les petites et moyennes villes, la fraude est visible et décomplexée. Quand la presse européenne se félicite d’élections qui se seraient « bien passées », elle répète les éléments de langage de la propagande d’Erdoğan, invisibilisant la situation au kurdistan. Les observateurices du Conseil de l’Europe sont quasi absent·es ; leur délégation n’est allée qu’à Diyarbakır (Amed), où elle n’a pas pu constater les fraudes massives qui ont affecté le reste du pays.
Bras de fer victorieux autour de la ville symbole de Van
Mais la triche et l’intimidation n’ont pas empêché la victoire de l’opposition. A Van, le gouvernement AKP a tenté d’invalider l’élection d’Abdullah Zeydan à la mairie, avant de renoncer devant l’intense mobilisation populaire autour de cette ville symbole du Kurdistan. La mairie restera donc au Dem Parti. La lutte a payé !
Des manœuvres de coup d’État analogues avaient été déployées en 2016 et 2019 pour empêcher le Parti démocratique des peuples (HDP), prédécesseur du Dem Parti, de s’emparer des mairies. À ce jour, les co-maires et élu⋅es municipaux du HDP sont toujours emprisonné⋅es. L’Etat a donc déjà, pendant huit ans, confisqué un pouvoir démocratiquement élu.
La population est dans les rues dans de nombreuses villes du Bakûr pour protester contre cette usurpation et a ainsi obtenu le recul d’Erdoğan. De nombreuses personnes ont été blessées et arrêtées par la police.
La guerre de l’Etat turc contre les Kurdes, à l’intérieur et à l’extérieur de ses frontières
Dans son discours le soir des élections, Erdoğan a répété sa volonté de « sécuriser la frontière avec l’Irak avant l’été » et de créer une « corridor de sécurité » de 30 kilomètres sur le territoire du Rojava, le long de la frontière syrienne. Il réaffirme ainsi sa volonté d’intensifier sa guerre contre les Kurdes par delà les frontières.
La mobilisation – sur place comme au niveau international – détermine le rapport de force qui peut être opposé à l’AKP. L’enjeu est d’enrayer la destitution des maires du Dem Parti largement élus ce dimanche !
Restons vigilant⋅es et mobilisé⋅es, gardons nos yeux braqués sur ce qu’il se passe au Kurdistan !
Vive la résistance du peuple kurde ! Bijî berxwedana Kurdistan !
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rdv 18h45 pl. J. Jaurès contre la conf' du petit duce #Adinolfi organisée par les néofascistes de #DesToursEtDesLys
Prudence maximale à proximité
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Un plan d’urgence pour tous les services publics du 93
En 1998, un vaste mouvement de contestation associant parents, profs et élèves avait gagné un plan d’urgence. Vingt-cinq ans plus tard, la Seine-Saint-Denis reste un des départements les plus sous-équipés au regard de sa population. Ne laissons pas faire, réclamons nos droits !
En 1998 les enseignants et les parents mais aussi de nombreux lycéens de Seine-Saint-Denis menèrent trois mois de mobilisations et de grèves sous le slogan : « On veut des moyens, on n’est pas des moins que rien ». Le résultat fut extraordinaire : 3 000 embauches d’enseignants et 5 000 « emplois jeunes », créations de normes particulières sur les effectifs par classes et pour les écoles les plus en difficultés, 5 milliards accordés pour la rénovation des bâtiments…
Quand la population s'exprime
La lutte fut menée par une « Coordination des établissements en grève » qui fonctionnait en assemblée générale en présence des responsables syndicaux enseignants et des parents d’élèves de la FCPE. Le mouvement en cours peut produire des résultats identiques !
Mais l’État et les gouvernements successifs n’ont pas laissé se dégrader que l’école de notre département. Tout le système de santé est délabré : hôpital, Ehpad, santé mentale, centres de santé municipaux… Il manque des milliers de professionnels et des dizaines de structures d’accueil.
Transports publics sous dimensionnés
Dans les transports en commun nous souffrons quotidiennement du délabrement des réseaux et des horaires inadaptés. Les travaux qui s’éternisent pour ouvrir de nouvelles lignes créent des difficultés incompréhensibles et, avec la densification de population voulue par les pouvoirs locaux et les promoteurs immobiliers, nous savons déjà qu’ils seront insuffisants au moment de leur mise en service.
Dans le logement enfin, l’arnaque des plans de rénovation urbaine est désormais sous les yeux de tous : destruction massive de logements sociaux, construction de copropriétés déjà dégradées et densification délirante en grignotant les peu d’espaces verts qui étaient pourtant nos seuls espoirs pour lutter contre le réchauffement climatique et les canicules urbaines.
Le capitalisme voilà l'ennemi !
Nous refusons de vivre dans un ghetto géant. Nous voulons une réindustrialisation pour de vrais emplois et de vrais salaires : assez de précarité et de jobs au rabais. Nous voulons la reconstruction d’espaces agricoles de proximité plutôt que de nouvelles chaînes de hard discount qui nous vendent des aliments industriels importés de toute la planète.
Mobilisation générale !
Retour à la rue à #Tours et partout en France suite à la fin de la #TreveHivernale : apéro solidaire demain 18h30 école Michelet à l'appel du collectif Enfants à la rue 37
Que ça ne soit pas qu'un PoissondAvril twitter.com/villedetours/statu…
Réquisition des logements vides !
À #Tours les enfants dorment dans la rue : rdv le #2avril à 18h30 pour un apéro solidaire à l'école Michelet, 40 rue G. Thiou. Stoppons la chasse aux pauvres, des logements pour tout·es !
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1er avril : Un logement digne pour tous et toutes 28/03
Prix des loyers, flambée de l’immobilier, spéculation, expulsions, ségrégation urbaine, lutte contre la gentrification, réquisitions de logements vides… Ce 1er avril, à l’occasion de la journée européenne d’actions pour le droit au logement, mobilisons nous !
1) Etat des lieux du logement.
La trêve hivernale se terminera le 31 mars dans un contexte plus difficile que jamais. L’inflation et la hausse du prix de l’énergie se conjuguent à celle des loyers et font craindre à de nombreux·ses locataires la perte de leur logement. Dans cette perspective 13 manifestations dans 12 villes sont organisées pour réclamer un logement digne pour toutes et tous.
2) La loi Kasbarian
Alors que l’Insee comptait en 2023 trois millions de logements inoccupés (soit une hausse de plus de 60 % depuis 1990), la loi Kasbarian-Bergé a été adoptée en juillet 2023 dans une dynamique de criminalisation de la pauvreté. Cette loi « visant à protéger les logements contre l’occupation illicite » vise en faite à considérer les locataires comme des délinquant·es : accélération des procédures d’expulsion pour loyer impayé, triplement des sanctions encourues par les squateur·ices et création d’un délit punissant « la propagande ou la publicité en faveur de méthodes encourageant la violation de domicile ». En plus de l’exploitation au travail, les travailleurs et travailleuses se prennent la violence capitaliste jusqu’à dans leur logement et particulièrement pour les habitant·es des quartiers populaire dont la vie est de plus en plus sacrifiée aux bénéfices des marchand·es de sommeil et des spéculateur·ices. En ayant nommé Guillaume Kasbarian – porteur de cette loi « antisquat » – ministre du Logement en début d’année, le gouvernement dont la moitié sont millionnaires montre à nouveau son mépris pour les classes populaires.
3) Le logement du point de vue de l’UCL ou des communistes libertaires
Nous promouvons l’action directe des premièr·es concerné·es pour remettre en cause la propriété privée et le marché capitaliste du logement. Préalable nécessaire à la construction d’un service publique socialisé du logement. C’est pourquoi nous soutenons l’action des collectifs et associations de lutte contre le mal logement comme le DAL.
Nous considérons que la lutte pour l’amélioration immédiate des conditions de vie pourra amener à cette rupture. C’est pourquoi nous revendiquons :
– Le blocage des loyers.
– La réquisition des logements laissés vides à des fins spéculatives.
– Une taxe dissuasive sur les mètres carrés inoccupés.
– Le respect du SRU qui impose un seuil minimal de logement sociaux aux communes qui restent encore largement non suivi.
– L’isolation du bati afin de minimiser la facture énergétique des locataires et des normes environnementales élevées.
– L’accès aux logements sociaux pour les personnes sans papiers.
– Pas d’expulsion des bidonvilles sans relogement social durable prenant en compte les situations familiales.
– Un contrôle renforcé pour détecter et sanctionner les marchands de sommeil.
– Une réelle politique d’accompagnement renforcée pour les personnes sans-abris afin de ne laisser personnes à la rue.
– Une augmentation des capacités des hébergements d’urgence, pour les sans-abris avec ou sans-papiers, mais également pour les femmes victimes de violences conjugales.
– Un sans abri sur quatre en France est passé par l’ASE. Il faut plus de moyen pour la protection de l’enfance, un toit et un revenu pour chaque jeune autonome.
Soyons dans la rue le premier avril pour le droit à un logement digne pour toutes et tous !
L'#UnionCommunisteLibertaire a signé ce texte suite au #8mars
coordfeministe.wordpress.com/2…
Le sionisme n’est pas une cause féministe !
Ce qu’il s’est passé le 8 mars avec le collectif sioniste “Nous vivrons”
Ce 8 mars, le groupe sioniste “Nous Vivrons”, soutien de la politique coloniale et violente du gouvernement israélien de Benyamin Netanyahou, a exigé d’avoir un cortège dans les manifestations féministes. En venant provoquer le mouvement féministe, en nous sommant de nous positionner du côté d’Israël à coup de chantage médiatique, “Nous Vivrons” déroule son agenda politique en instrumentalisant, une nouvelle fois, la lutte contre les violences faites aux femmes pour justifier leur narratif.
À Bordeaux, “Nous Vivrons” a demandé à manifester aux côtés de collectifs féministes qui n’auraient pas signé l’appel local et international au soutien du peuple palestinien. Le mouvement féministe a refusé leur participation et leur a signifié en amont par mail, avec le soutien de l’intersyndicale locale, co-organisatrice de la manifestation du 8 mars. Le groupe sioniste a malgré cela essayé d’infiltrer la manifestation, sans succès, et s’est dispersé sans heurt.
À Paris, le cadre unitaire “Grève féministe” craignait de se faire accuser d’antisémitisme dans les médias s’il refusait la présence de “Nous Vivrons”. Cédant au chantage médiatique, il a accepté de leur faire une place dans le cortège. Le collectif a pu manifester avec un service d’ordre violent et provocateur envers les manifestant·es défendant les droits de la Palestine et des palestinien·nes. Plusieurs agressions ont pu être constatées, entraînant blessures et hospitalisation.
Les sionistes instrumentalisent le féminisme
Suite au 8 mars, “Nous Vivrons” a fait le tour des médias afin de renforcer leur position, donnant une place encore plus importante au discours pro-colonisateur israëlien et disqualifiant les soutiens, notamment féministes, à la Palestine. Leur tactique est assez claire : ce groupe accuse en avance le mouvement féministe d’être antisémite, amalgame antisémitisme et antisionisme dans leurs différentes interventions, puis vient provoquer des heurts, notamment au travers de leur service d’ordre, dans nos manifestations, afin de valider a posteriori leur idéologie.
Nous réaffirmons haut et fort que les amalgames entre antisionisme et antisémitisme ne sont pas tolérables et sont une des causes de l’augmentation de l’antisémitisme en France.
Pour nous, il est clair que “Nous Vivrons” est un collectif sioniste et suprémaciste. Ce collectif milite pour la reconnaissance des violences commises contre les israélien·nes mais ne remet jamais en question la colonisation, les violences sexuelles commises par l’armée israélienne sur les femmes palestiniennes, ni ne se scandalise du génocide en cours. Nous dénonçons l’instrumentalisation par les groupes sionistes et pro-sionistes de nos corps, des violences que nous pouvons subir et de nos identités, pour légitimer la colonisation et le génocide en cours actuellement à Gaza.
Ces groupes instrumentalisent aussi par leurs amalgames les corps des juif·ves, les violences qu’iels subissent et ont subi, et cherchent à faire taire toute voix juive qui ne défend pas leur projet colonisateur et génocidaire. De même, ils justifient ce qui se passe en Palestine “au nom de l’amour”, pour la défense des femmes et personnes LGBTQIA+ israéliennes et occidentales : face aux menaces que représenteraient les palestinien·nes, présenté·es comme un peuple barbare, réactionnaire, alors tout serait justifiable.
Nous refusons également ce double standard qui consiste à rendre valable et digne d’être défendus les corps et les vies des israélien·nes, mais pas les corps ni les vies des palestinien·nes. Alors qu’il est sans cesse demandé au mouvement de solidarité avec la Palestine de dénoncer les crimes du 7 octobre, il n’est jamais demandé aux sionistes de dénoncer le génocide en cours. Ce double standard déshumanise les palestinien·nes et constitue une volonté du gouvernement israélien et de leurs soutiens de rendre acceptable par l’opinion publique la colonisation, le nettoyage ethnique et le génocide du peuple palestinien.
Le sionisme est un fémonationalisme
En tant que féministes, nous déployons des stratégies pour abolir toutes les violences. Nous avons la responsabilité de lutter contre le fémonationalisme qui, sous couvert de lutte contre certaines violences sexistes et sexuelles, soutient des systèmes de colonisations racistes et génocidaires comme en Palestine, et qui, en France, justifie des violences racistes et islamophobes.
Ce n’est pas parce que les pancartes de “Nous Vivrons” étaient tenues par des femmes que leur présence dans nos manifestations était acceptable. Nous défendons que la lutte féministe ne peut pas être réduite à la lutte des femmes contre les hommes mais qu’elle est bien la lutte contre des systèmes de domination et de violence dont le sionisme fait partie, en tant que système colonisateur et d’apartheid. “Nous Vivrons” instrumentalise les corps de toutes les femmes, en revendiquant leur droit à être présent·es dans une manifestation féministe sur cette simple base. De fait, les femmes du collectif instrumentalisent leurs propres corps au service du sionisme. C’est une position essentialiste, qui rappelle celles du groupe “féministe” d’extrême droite Némésis qui réclame le même droit sur la même base. Nous refusons d’entrer dans ce jeu essentialiste, il faut voir en ces groupes leur positionnement politique avant leur genre.
Pour toutes ces raisons, le cadre unitaire national “Grève féministe” n’aurait jamais dû accepter leur présence dans la manifestation parisienne. Il n’est pas possible, si nous nous revendiquons féministes internationalistes et anticolonialistes, de transiger avec le sionisme. Il est impensable d’être féministe et du côté de la colonisation et du génocide. C’est cette décision qui a mis en danger des manifestant·es féministes pro-palestinien·nes et qui divise le mouvement féministe. Car désormais, les forces réactionnaires cherchent à trier les “bonnes”, des “mauvaises” féministes. Celles qui pensent qu’on peut mettre de côté notre empathie le temps d’une manifestation et accepter un collectif qui soutient des génocidaires pour l’apaiser, et celles qui considèrent que nos principes ne sont pas à monnayer contre la paix médiatique, et qu’en matière de massacre d’une population on ne doit jamais commencer à bégayer au risque de ne plus savoir comment parler.
Pour un féminisme décolonial, non-essentialiste et anticapitaliste : grève féministe !
Nous tenons à réaffirmer clairement qu’il existe une pluralité de communautés et de voix juives que le sionisme médiatisé et tapageur de “Nous vivrons” doit cesser de silencier. Les féministes juives qui luttent contre toutes formes d’oppression ont toute leur place dans nos cortèges féministes, elles doivent y être et y seront en sécurité. Notre position est sans ambiguïté : pas de lutte féministe sans lutte contre le racisme, l’antisémitisme et le colonialisme.
Nous condamnons les viols et les violences commises contre les femmes israéliennes et palestiniennes tout comme l’utilisation du viol comme arme de guerre. Nous savons que la fin des violences en Palestine et en Israël n’adviendra qu’avec un cessez-le-feu, la fin de la colonisation et du blocus, et le droit pour les palestinien·nes de vivre dignement et librement sur leur terre.
Pour nous, l’outil de la grève féministe est précisément celui qui peut et doit permettre de construire des alliances avec les mouvements qui luttent contre le racisme et pour les droits des peuples à être libres, parce que la grève met au centre les capacités d’actions des femmes et minorités de genre à retourner leur position de subalterne pour tout arrêter et tout repenser. Il s’agit donc d’un outil politique qu’on ne peut pas construire avec les courants fémonationationalistes, parce qu’on ne peut pas lutter contre l’oppression main dans la main avec l’oppresseur.
Par ce texte, nous revendiquons haut et fort que majoritairement le mouvement féministe en France est pro-Palestine, en soutien aux opprimé·es, et ne transige pas avec ce principe !
Nous appelons à continuer à tisser des liens et des alliances entre nos mouvements féministes et les mouvements contre le racisme, contre l’antisémitisme et contre la colonisation, dans de vastes mouvements féministes anticapitalistes et décoloniaux pour les droits des peuples à disposer d’eux-mêmes !
La libération de la Palestine est une cause féministe !
Signataires :
Allumeuses
Assemblée Féministe Paris Banlieue
Assemblée Féministe Transnationale
Association Adelphi’Cité Marseille
Association Nouvelles Rênes
Ag feministe chambéry
AG Feministe Gironde / Bordeaux
CLAC – Nantes
CLF Montreuil
CNT 35
CNT 38
Collages Féministes Aix en Provence
Collages féministes Bordeaux
Collages féministes Montluçon
Collages féministes de Rouen
Collages Féministes Strasbourg
Collectif Arc En Ci.elles – Strasbourg
Collective FFFRAC Mantes la Jolie 78
Collectif des Mésanges Lodève (34)
Collectif féministe LA GRENADE, Metz
Collectif lillois de luttes féministes
Comité de soutien à Hanane Ameqrane
Commune Vision ; Rennes
Du Pain et des Roses
Emancipation tendance intersyndicale
Extinction Rébellion Grenoble
Féministes4jina.Paris
Féministes Révolutionnaires Paris
GARCES, Paris
Groupe d’Action Féministe Rouen
Groupe féministe de Fougères
Kollectif Kuné
Kessem, juives décoloniales
La Bulle – Rennes
La Relève Féministe
La Pride des Banlieues, Saint-Denis
Le Parti de Gauche ille-et-vilaine
Les Affolé-e-s de la Frange (Limoges)
Les inverti·e·s
Les Jeunes Insoumis•es de Grenoble
Les Ourses à plumes
Marseille 8 Mars
Mésanges
Mouvement des mères isolées
MNL13
#NousToutes
NousToutes 06
Nous Toutes 27
NousToutes33 (Bordeaux)
NousToutes35 (Rennes)
NousToustes38 (Grenoble)
NousToutes79
Nous Toutes 95
Nous Toutes Juvisy
NousToutes Lorient (56)
Noustoustes Marseille
Nous Toutes Nord Essonne
Nous Toutes Paris 13/14
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Tsedek!
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Gaza : Le massacre continue, la mobilisation aussi
Bientôt 6 mois de massacres de masse à Gaza ! Alors que Netanyahou tente d’élargir le conflit et s’apprête à bombarder Rafah, la solidarité en France fait face à une répression politique inédite. Il s’agit de ne pas lâcher prise.
Plus de 30 000 morts, très probablement plus, un territoire en ruine, des risques de maladie et de famine, des blessé·es et des mutilé·es en masse dans une situation de manque de soin. S’y ajoutent les menaces de retrait de subventions qui pèsent sur l’UNRWA, principal organisme d’aide aux réfugiés et au peuple palestinien.
Alors que le risque de génocide est confirmé depuis novembre, appuyé désormais par la plainte de l’Afrique du Sud, que les violences et meurtres de la part de colons se multiplient en Cisjordanie, il n’est plus contestable que nous assistons à des crimes contre l’humanité, visant la destruction totale de la société gazaouie, dans la continuité du projet colonial du gouvernement israëlien. Israël effectue maintenant des tirs sur le Liban avec la complicité des USA, qui de leur côté effectuent des tirs au Yémen et en Irak.
En effet, Netanyahou, aujourd’hui sur un siège éjectable, fait le pari d’une déflagration généralisée dans la région par des provocations multiples, seul moyen pour lui que le soutien occidental ne vacille pas face à la montée des contestations mondiales.
Une mobilisation qui gagne
De son côté la France, si elle hausse discrètement la voix par moment, continue de fournir des satellites et de vendre des armes à l’état d’Israël et se retrouve complice de crime contre l’humanité ! Dans le monde, plusieurs mobilisations de blocage des dépôts d’armes ont eu lieu. Pas encore en France.
La campagne Stop Arming Israël France s’est récemment créée dans ce but.
La répression et les intimidations des soutiens à la Palestine ont pris des proportions inédites en France de la part de l’Etat [1] comme de la société civile [2]. Le consensus pro-israélien se durcit, ébranlé par les mobilisations qui se maintiennent dans les rues depuis octobre.
Cette ambiance maccarthyste traverse la gauche comme le prouve l’interdiction par la mairie de Paris de réunions publiques avec Judith Butler organisées par le collectif juif décolonial Tsedek, attaqué pour son antisionisme assumé.
Pour autant, les actions et campagnes initiées par différents collectifs et la campagne BDS [3] mobilisent largement ; plusieurs actions et collectifs se créent dans les quartiers populaires. Y entraîner de plus en plus de secteurs syndicaux et du monde du travail doit être un objectif pour les révolutionnaires dans les mois à venir.
Malgré l’ampleur du massacre, la résistance palestinienne à Gaza, qui regroupe toutes les composantes politique palestiniennes, n’est en rien défaite et fait subir des pertes importantes aux israéliens. La mobilisation internationale ne faiblit pas notamment aux États-Unis, et l’occident est définitivement décrédibilisé par ses deux poids deux mesures.
La solidarité internationale ici est un front de lutte pour couper les cordons ombilicaux de la colonisation ! Il s’agit de la renforcer en France en menant diverses batailles idéologiques, politiques et antiracistes. Parmi elles, attaquons l’idée qui fait consensus en France et légitime le soutien à Israël depuis des années : remettons en cause la « guerre contre le terrorisme » !
Nicolas Pasadena (commission antiraciste de l’UCL)
[1] « 7 octobre : Aurore Bergé menace de couper les subventions aux associations féministes », L’Humanité, 12 février 2024.
[2] « Guerre Israël-Gaza : la juriste franco-palestinienne Rima Hassan prise pour cible par l’animateur Arthur », L’Humanité, 5 février 2024.
[3] « Boycott, désinvestissement et sanctions pour stopper l’apartheid israélien », Unioncommunistelibertaire.org
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Tsedek ! Une voix juive pour la justice
Créé en juin 2023, le collectif Tsedek ! connaît une croissance très rapide depuis le début de l’offensive génocidaire israélienne à Gaza. Né à Paris, il essaime à Lille, à Marseille, à Grenoble, à Lyon... Il fait entendre une autre voix juive, décoloniale et antisioniste.
Voilà qui ne peut que déplaire aux inconditionnels du massacre. Déjà trois événements de Tsedek ont été déprogrammés à la suite de pressions [1], et les anathèmes contre Tsedek reprennent bien souvent la rhétorique antisémite la plus classique [2]. Mais qu’est-ce que ce collectif, et pourquoi fait-il aussi peur ?
« Tsedek » est le mot hébreu pour « justice ». Et c’est cette notion qui est au centre du travail antiraciste de ce collectif. Justice en Palestine tout d’abord : la paix n’aura pas lieu sans justice et sans égalité. Le respect des droits des Palestinien·nes (levée du blocus, droit au retour, libération des prisonnièr·es, lutte contre le mur et les expulsions...) est une nécessité pour que tous et toutes puissent vivre à égalité dans un pays démocratique, de la Mer au Jourdain.
Justice en France aussi, contre le racisme d’État, car l’engagement antiraciste n’est pas complet s’il ne s’attaque pas à notre propre impérialisme. De la loi Darmanin aux crimes policiers en France, ou à la répression des manifestations au Sénégal avec le soutien de l’État français, Tsedek participe aux manifestations et communique son soutien à toutes les luttes contre le racisme d’État. Justice enfin, pour tous les peuples opprimés, partout dans le monde. Dans son communiqué de soutien à la manifestation kurde du 6 janvier 2024 [3], Tsedek compare l’histoire juive et l’histoire kurde : « nous partageons la même communauté de destin face à l’ethno-nationalisme et à l’impérialisme ».
« Pour une judéité émancipée du sionisme »
Le collectif considère qu’une analyse matérialiste du sionisme ne peut que conduire à le définir comme un projet colonial. « La meilleure définition du sionisme se fait par sa manifestation matérielle : l’apartheid, les expulsions, les destructions de maisons, la déshumanisation, le blocus, les prisonniers politiques, les exécutions sommaires, le nettoyage ethnique et le génocide » [4]. Tsedek entend donc porter une voix juive critique. Face au massacre à Gaza, il lançait le 31octobre une pétition qui proclamait : « vous n’aurez pas le silence des Juifs de France ». Dans les manifestations parisiennes pour un cessez-le-feu à Gaza, le collectif apparaît dans un « bloc juif » aux côtés d’autres organisations juives antisionistes (Oy Gevalt, Kessem, l’UJFP) [5].
Si Tsedek s’oppose aux organisations et collectifs qui prétendent représenter la parole juive, ce n’est pas pour parler « au nom » des juifves, mais bien pour insister sur la pluralité des opinions juives. Les amalgames entre judéité et sionisme, et entre antisionisme et antisémitisme, conduisent à essentialiser les Juifves, comme s’iels étaient une masse uniforme qui parlerait d’une seule voix en faveur du colonialisme. Pour refuser cette capture des voix juives, il y avait besoin d’un nouveau collectif qui permette aux personnes juives antisionistes de s’exprimer en première personne, contre les institutions qui parlent à la place ou au nom de toutes les personnes juives. Dès lors, Tsedek n’hésite pas à assumer la conflictualité avec les organisations juives sionistes, du CRIF à l’UEJF, qui le lui rendent bien.
Contre l’antisémitisme et son instrumentalisation
Au centre des engagements du collectif, il y a aussi la lutte contre l’antisémitisme. Tsedek en propose une lecture matérialiste, qui rompt avec les analyses dominantes. Dans le manifeste du collectif, l’antisémitisme est défini comme un « produit de la suprématie blanche ». En 1492, la même année où Christophe Colomb ouvrait la voie à la colonisation du continent américain, l’Espagne expulsait les Juifs et Juives au nom de la « pureté du sang » : ce sont bien les États-nations européens qui ont fait des Juifs et Juives des parias, qui les ont racialisé·es et discriminé·es.
Lorsque ces mêmes États-nations utilisent la lutte contre l’antisémitisme pour produire autour d’eux l’unité nationale, comme ce fut le cas avec la manifestation du 12 novembre à Paris, Tsedek y voit une instrumentalisation hideuse, d’autant plus quand il s’agit d’utiliser le prétexte de la lutte contre l’antisémitisme pour renforcer d’autres racismes, notamment islamophobe [6]. Le même gouvernement qui appelait à cette marche contient entre autres Gérald Darmanin, auteur de déclarations immondes sur les Juifs qui « pratiquent l’usure » et font naître « troubles et réclamations » !
Au contraire, la lutte contre l’antisémitisme de Tsedek est intimement liée à tous les autres antiracismes. L’antisémitisme, comme tous les racismes, a ses spécificités, mais en faire un racisme exceptionnel est une faute politique : la lutte antiraciste sera commune ou ne sera pas. Dans la lutte contre l’antisémitisme, comme dans toutes les luttes, « la boussole ne peut être que celle de la justice, de l’émancipation collective et des débouchés politiques en rupture avec les structures qui produisent l’antisémitisme. Sans cela, elle est désarmée » [7].
Daniel (UCL Lyon)
[1] Un événement prévu le 6 janvier, au Cirque Electrique de Paris intitulé « contre l’antisémitisme, son instrumentalisation et pour la paix révolutionnaire en Palestine » a été annulé par la mairie qui prêtait la salle, possiblement en cédant à des menaces de groupes sionistes d’extrême droite. Le 30janvier, c’était une projection du film La Zone d’intérêt en présence de la chercheuse Sadia Agsous-Bienstein, prévue au cinéma Magestic Bastille, qui était déprogrammée en dernière minute. Une nouvelle séance était prévue le 6 février, avec l’historien Johann Chapoutot comme deuxième invité. Celui-ci a décliné l’invitation en dernière minute, et la salle de cinéma a refusé que la première s’exprime seule, avec des justifications dont l’intéressée a souligné le sous-texte raciste.
[2] Sur le site Akadem, une chronique intitulée « Tsedek et Neturei Karta, les Juifs préférés des antisémites » présente par exemple Tsedek comme un groupe « marginal et surmédiatisé ».
[3] « Avec la gauche kurde le 6 janvier Justice et vérité pour les six assassinats ! », Alternative libertaire, Février 2024
[4] https://x.com/TSDKcollectif/status/1749834211131805949
[5] Pour une présentation de l’UJFP dans les colonnes d’Alternative Libertaire : « Pierre Stambul (UJFP) : “Notre audience s’accroît” » , Alternative Libertaire, mai 2009
[6] L’UCL a développé une position très similaire dans notre communiqué du 18 novembre 2023, « Lutte contre l’antisémitisme : les tentatives dangereuses de réappropriation par l’extrême droite »
[7] Tsedek, « L’antisémitisme doit être combattu, son instrumentalisation aussi », 3 novembre 2023.
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Retour « au taf », les syndicalistes autogestionnaires et libertaires ! – UCL - Union communiste libertaire
Le mouvement social de 2023 pour la défense des retraites a montré à quel point le syndicalisme de lutte restait un acteur incontournable de la lutte des classes... mais aussi à quel point il était…UCL - Union communiste libertaire
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Nous c’qu’on veut, c’est un plan d'urgence !
Ce mouvement est le fruit d’un travail de mobilisation élaboré par les syndicats de lutte commencé dès le mois de septembre 2023.
Du fric pour l’école publique ! Du pèze pour le 93 !
Depuis le 26 février a débuté un grand mouvement social dans l’éducation en Seine-Saint-Denis. C’est le fruit d’un travail de mobilisation élaboré par les syndicats de lutte commencé dès le mois de septembre 2023.
Dès septembre, des grèves ont eu lieu dans plusieurs établissements du 93, notamment pour protester contre l’interdiction de l’abaya et les manques de personnels. Une intersyndicale a décidé de se réunir pour construire un mouvement collectif et unitaire. La FSU, la CGT, la CNT et Sud Education ont décidé de lancer un grand recueil de doléances pour construire un revendicatif commun destiné à servir de base à une mobilisation. Sur le modèle de la mobilisation victorieuse de 1998, il a été décidé d’exiger de nouveau un Plan d’urgence pour l’éducation dans le 93.
Un mouvement, ça se construit...
Un questionnaire a permis de recenser les manques de moyens. Il en ressort que le 93 a besoin de 358 millions d’euros et de l’embauche de 5200 enseignant·es, du renforcement des pôles médicaux et sociaux par une embauche de 200 infirmier·es, médecins et assistant·es sociales, de 1055 postes en vie scolaire et de 2200 AESH. Concernant les locaux insalubres (infestations de nuisibles dans 30 % des écoles) et mal isolés (70 % des collèges), l’intersyndicale demande un autre collectif budgétaire [1] pour un grand plan de rénovation et d’investissement.
Tout le monde connaît l’état catastrophique du système éducatif public dans le 93. Pour autant, ce travail sert concrètement à la construction de la mobilisation et la crédibilise. Les militant·es syndicaux ont sillonné le département pour populariser ce qui n’était encore qu’une campagne pour un plan d’urgence. Ils et elles ont organisé des tournées et des réunions d’information syndicale, des campagnes de mails coordonnés, etc. Le 21 décembre, une conférence de presse et un meeting ont été organisés à la Bourse du Travail départementale à Bobigny pour publiciser le chiffrage des doléances et lancer la mobilisation, avec le soutien de la CGT, de la FSU et de Solidaires.
En janvier et février, le travail de fourmi a continué et l’idée de ne pas faire la rentrée après les vacances d’hiver a émergé. Les chiffres de la grève nationale du 1er février ont encouragé les militant·es en ce sens et les annonces de Gabriel Attal (réforme du choc des savoirs) puis les déclarations de l’éphémère ministre Oudéa-Castera sur l’école publique ont attisé les braises.
Et si le 93 ne faisait pas sa rentrée ?
De fait, la grève de la rentrée du 26 février a été un succès avec 60 % de grévistes en moyenne dans le 2d degré. De nombreux établissements ont voté la reconduction, des AG ont lieu dans plusieurs villes du département, parfois à des endroits où il se passe peu de choses (à Aulnay-sous-Bois par exemple). De plus, à l’issue d’un rassemblement de 700 personnes à côté du Lycée Stanislas à Paris, une assemblée générale (AG) départementale a réuni 150 enseignant·es qui ont voté la reconduction de la grève pour le lendemain.
Le 27 février, le rassemblement devant la direction départementale de l’éducation nationale a été un succès, tout comme l’AG départementale. À partir de ce moment-là, l’AG et l’intersyndicale n’ont cessé d’appeler à la grève reconductible et à sa massification. Cela a été le cas le 7 mars avec une augmentation du nombre de grévistes (60 % dans les collège et lycées et 45 % dans les écoles) du nombre de personnes en manifestation (plusieurs milliers) et en AG. Petit à petit, le mouvement a agrégé les parents d’élèves qui organisent des rassemblements le soir ou des manifs du samedi dans les principales villes du 93.
Le jeudi 14 mars, des cortèges ont afflué de 8 points de départ dans le département pour converger à 5000 vers la préfecture. Du jamais vu depuis plusieurs décennies ! Le lendemain, ce sont les parents qui ont organisé une opération « écoles, collèges et lycées déserts » dans tout le département.
Le mouvement semble devoir durer, fort de son organisation en AG respectueuses des mandats des établissements et des villes qui se réunissent systématiquement en amont des AG départementales, tenant bon le cap des revendications locales pour un plan d’urgence du 93 articulées aux revendications contre les réformes « choc des savoirs ».
La situation révoltante et la jeunesse d’une partie importante des personnels donne du ressort à la mobilisation, mais elle n’est pas égale dans l’ensemble du département. La grève reconductible est en fait majoritairement perlée. C’est ce qui permet aussi que la mobilisation dure depuis 3 semaines au moment où cet article est écrit. Une partie de sa réussite tient aussi au fait qu’elle est concrète et parle aux travailleur·ses aussi bien qu’aux usagèr·es. Pour autant la marche est haute : les victoires de 1998 et 2015 se sont faites sous des gouvernements sociaux-démocrates. Face à la droite qui refuse de céder face aux aux mobilisations sociales, il va falloir amplifier le rapport de force.
La casse assumée de l’enseignement public
Malgré l’ampleur de la mobilisation, le soutien de la FCPE et celui des élu·es NUPES, la réponse des autorités hiérarchiques est inexistante et méprisante. Ainsi, ni le directeur départemental, ni la rectrice, ni même le cabinet ministériel (qui a reçu l’intersyndicale le 15 mars) ne veulent rien lâcher : pas le moindre million, ni même un déblocage de postes. Quand on sait que le SNU et le port de l’uniforme coûteraient plus de 4 milliards d’euros, on touche du doigt la réalité des choix politiques faits par le gouvernement. De l’argent public, il y en a également beaucoup dans les caisses des établissements privés dont le financement est assuré à plus de 70 % par l’État.
« Du fric pour l’école publique ! Du pèze pour le 93 ! » est l’un des slogans les plus scandés de ce mouvement. Si la reconduction de la grève annoncée après le 19 mars s’enracine et s’amplifie, on peut s’attendre à un printemps très chaud dans le 93 et peut être partout ailleurs en France dans l’éducation nationale !
Des profs communistes libertaires du 93
[1] Des moyens supplémentaires issus du budget de l’État.
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1880-90 : Quand l’antisémitisme se voulait doctrine sociale
Dans la décennie 1880, le mouvement socialiste était travaillé par l’antisémitisme. Il s’en dissocia dans les années 1890. Puis, en 1898-1899, avec l’Affaire Dreyfus, le classa définitivement comme réactionnaire, sans se défaire entièrement de ses scories. Quels étaient les fondements de cet antisémitisme de gauche ? Pourquoi l’hésitation initiale à le pourfendre ? Et comment la prise de conscience s’opéra-t-elle ?
En 1895, à la veille de l’Affaire Dreyfus, l’attitude de l’anarchisme vis-à-vis de l’antisémitisme est assez similaire à celle du reste du mouvement socialiste : hostile sur le plan doctrinal, indifférente voire complaisante dans les faits. En ce XIXe siècle qui ressasse les stéréotypes de la judéophobie chrétienne, et où les théories racialistes « scientifiques » sont à la mode, l’antisémitisme n’est nullement une opinion honteuse. Il est même massivement véhiculé par la presse conservatrice et catholique.
L’historien Michel Dreyfus a calculé qu’en 1897, ses quatorze quotidiens touchent au total 2 millions de lecteurs. Très loin devant les 250.000 lecteurs atteints par les six titres républicains de gauche et socialistes. À lui seul, le quotidien papiste La Croix, qui se proclame « le plus antijuif de France » touche 500.000 lectrices et lecteurs. La thèse de Michel Dreyfus est qu’il n’y a pas eu de formulation d’un antisémitisme original par le socialisme, mais une puissante imprégnation par un antisémitisme ambiant. C’est pourquoi, plutôt que d’un « antisémitisme de gauche » il a préféré parler de l’« antisémitisme à gauche » [1].
Le premier à politiser la vieille judéophobie médiévale avec des arguments de son temps est le fourriériste Alphonse Toussenel, qui publie en 1847 Les Juifs, rois de l’époque [2]. Écrivant sous la monarchie de Juillet, qui voit l’essor du capitalisme français, Toussenel affirme en substance que l’ère qui s’ouvre signe le triomphe de l’« esprit juif », c’est-à-dire l’arrivée au pouvoir des affairistes, des spéculateurs et des banquiers, dont le baron Rothschild est la figure tutélaire –et qui sera la cible obsessionnelle des antisémites.
L’antisémitisme est présent chez Auguste Blanqui, le plus éminent chef révolutionnaire des années 1850-1860, mais pas de façon structurante. Il devient en revanche central chez certains de ses disciples, notamment Gustave Tridon [3].
C’est dans les années 1880 que cet antisémitisme politique effectue une percée dans les milieux socialistes et d’anciens communards, par le biais du blanquisme et de La Revue socialiste de Benoît Malon. Les ouvrages de Gustave Tridon, d’Auguste Chirac [4] et d’Albert Regnard [5] lui donnent alors ses lettres de noblesse. Mais nul ne fera autant qu’Édouard Drumont avec son livre publié en 1885, La France juive [6].
À la différence des précédents, Drumont est un catholique assidu, et son anticapitalisme n’est que superficiel. Son talent de pamphlétaire est en revanche bien supérieur, et il sait présenter au grand public les thèses antisémites sous un jour sensationnel. Son style, c’est le scandale et l’outrance. Le succès de librairie est phénoménal : 140 rééditions en deux ans.
Réfutation doctrinale, mais indifférence politique
Tridon, Regnard, Chirac ou Drumont n’échafaudent, au plan théorique, qu’un salmigondis mêlant anticapitalisme et racisme –un racisme où la « race », mot à tout faire, procède à la fois du sang, de la religion, de la culture et de l’appartenance à la classe capitaliste. Ils n’en élèvent pas moins leur antisémitisme au rang de doctrine politique [7]. Comment le mouvement ouvrier a-t-il réagi à cette proposition doctrinale ? Par un haussement d’épaules.
Durant la majeure partie des années 1880, les journaux anarchistes et socialistes tiennent officiellement l’antisémitisme pour une doctrine erronée. Non pas sur la base d’une argumentation antiraciste, mais parce que, de leur point de vue, les antisémites, en limitant leurs attaques à la fraction juive de la bourgeoisie, ne désignent pas la vraie cible : le capitalisme dans son ensemble.
Ceci étant dit, anarchistes et socialistes ne font pas un mauvais accueil au livre de Drumont : ses diatribes contre « Rothschild » et « les banquiers juifs » ne sont pas ressenties comme contre-productives si elles peuvent éveiller la révolte populaire contre le capitalisme en général.
L’ignorance d’un prolétariat juif
Le fantasme du « Juif usurier » circule d’autant plus aisément à gauche que le prolétaire français moyen ne côtoie ni Juifs ni Juives. En 1882, le Consistoire en recensait 60 000 en France, soit environ 0,17% de la population totale, pour l’essentiel invisibles car totalement assimilés. Les Juifs connus, par la force des choses, appartiennent plutôt à l’intelligentsia et à la bourgeoisie, où ils sont effectivement surreprésentés : en 1892, sur 440 patrons d’établissements financiers, on compterait 90 à 100 Juifs [8]. De telle sorte qu’avant les années 1900, comme le souligne Michel Dreyfus, « aucun penseur, aucun analyste n’a imaginé qu’il puisse y avoir aussi un prolétariat juif » [9].
Ce n’est qu’après l’Affaire Dreyfus que l’image du judaïsme se prolétarisera. L’immigration yiddish d’Europe de l’Est formera de forts contingents d’ouvriers tailleurs et chapeliers, qui constitueront d’ailleurs des syndicats affiliés à la CGT. En 1898, pour la première fois, la réalité du prolétariat juif aura été étudiée dans une thèse publiée à Bruxelles [10].
Les années 1880 marquent donc à la fois la pénétration de l’antisémitisme et son plus haut niveau d’acceptation au sein du socialisme. Une première dissociation survient au terme du phénomène boulangiste de 1888-1889.
Première dissociation suite au boulangisme
Mouvement antiparlementaire, patriote et confusionniste, agglomérant des tendances de droite et de gauche, le boulangisme rebat les cartes au sein du socialisme. Tandis que les « possibilistes » de Brousse et Allemane s’engagent dans la défense de la république, la majorité des blanquistes soutiennent Boulanger. Les guesdistes, eux, affichent une neutralité plutôt bienveillante à l’égard du « brav’ général ». Quant aux anarchistes, ils dénoncent à la fois le « césarisme » de Boulanger et l’hypocrisie de la république.
Quand le boulangisme décline, dès la fin de 1889, il cherche un second souffle en actionnant le levier antisémite, susceptible de faire vibrer la corde populaire, tout en attirant les subsides de l’aristocratie réactionnaire et cléricale. En l’absence de son chef exilé, l’état-major boulangiste noue alors une alliance avec la Ligue nationale antisémitique d’Édouard Drumont [11]. Leurs orateurs s’unissent pour un grand meeting le 18 janvier 1890 à Neuilly, sous le mot d’ordre « guerre aux Juifs ! » L’auditoire de 1 500 personnes est peu ordinaire : le prince de Tarente, le prince Poniatowski, le duc de Luynes, le duc d’Uzès, le comte de Dion et le vicomte de Kervéguen sont venus se mêler au petit peuple de la banlieue ouest [12]... L’événement est abondamment relayé par la presse qui y voit le possible acte de naissance « en France, d’un parti antisémite comme il en existe déjà en Allemagne, en Autriche, en Russie » [13].
Alors que l’antisémitisme n’avait été jusqu’ici, pour ainsi dire, ni de gauche ni de droite, ce marquage réactionnaire ne pouvait que le rendre suspect aux yeux des révolutionnaires. C’est sans doute pour cette raisons que, dans les années 1890, l’antisémitisme est identifié, à gauche, comme une escroquerie. Il disparaît de La Revue socialiste, et est rejeté par les socialistes antiboulangistes [14].
Les préjugés et stéréotypes ont la vie dure
Après l’épisode boulangiste, la doctrine antisémite est donc, en tant que projet politique, rejetée par la gauche. Mais les préjugés et les stéréotypes, eux, ont la peau plus dure. Pendant longtemps, ils surgiront encore sporadiquement, au détour d’un article, dans la presse anarchiste ou socialiste, réformiste comme révolutionnaire.
Et puis, il y a l’imprégnation du langage populaire. Les mots « juif », « youtre », « youdi » ou « youpin » y désignent alors couramment les pingres, les profiteurs et les exploiteurs, de façon plus ou moins déracialisée [15]. Dans un article du Père Peinard tout à fait symptomatique, Émile Pouget explique ainsi : « De religion, de race, il n’est plus question. Le youtre, c’est l’exploiteur, le mangeur de prolos : on peut être youtre tout en étant chrétien ou protestant ». De même que, selon lui, le mot « jésuite », loin de désigner un missionnaire catholique, signifie à présent, dans l’imaginaire populaire, « une ignoble crapule, un dégoûtant salop, vous faisant des mamours pour mieux vous étrangler » [16]. Une façon, sans doute, d’excuser les habitudes de son lectorat. Pouget y renoncera totalement quand, huit ans plus tard, il s’engagera à fond dans le camp dreyfusard.
Étonnamment, cette sémantique est véhiculée y compris par des révolutionnaires juifs comme Bernard Lazare qui, dans un livre de 1894, s’efforce d’établir un distingo acrobatique entre « juifs » et « israélites » – le premier terme devant selon lui s’appliquer aux grands banquiers et spéculateurs, et le second aux boutiquiers sans le sou [17]. Lazare va jusqu’à admettre que l’antisémitisme peut jouer un rôle positif : en encourageant la haine des riches, il hâtera une révolution qui fera disparaître les capitalistes et donc les causes de l’antisémitisme.
Mais dès l’année suivante, Bernard Lazare prend conscience de ces équivoques, et renie son livre [18]. À l’occasion d’une polémique avec Drumont, il affirme que l’« histoire de l’antisémitisme en France n’est qu’un coin de l’histoire du parti clérical ». Et de regretter : « Hier, on spécifiait avec affectation que, sous le nom de Juif, on désignait le loup-cervier de la Bourse, le financier louche, le courtier marron, celui qui vivait de l’agio et de la prédation, sans distinction d’origine et de culte. Il s’en trouvait qui s’excusaient presque de se servir du mot juif, mot, disait-on, consacré par l’usage et dont les israélites honnêtes auraient eu tort de se montrer froissés » [19].
Lazare, désormais, pense qu’il est temps de s’en montrer froissé, et d’en finir avec l’antisémitisme à gauche. C’est l’époque où, pionnier de l’Affaire Dreyfus, il se dépense sans compter pour prouver l’innocence du capitaine et convaincre les socialistes en général, et plus particulièrement ses camarades anarchistes, de s’engager. Ses efforts vont payer. Et l’Affaire Dreyfus sera le second moment, plus fondamental, de rejet par la gauche de l’antisémitisme.
Guillaume Davranche (UCL Montreuil)
Cet article ne traite que de la période 1880-1898. Pour les évolutions postérieures, il faut lire l’excellente synthèse de Michel Dreyfus, L’Antisémitisme à gauche, La Découverte, 2009.
OPÉRATION SÉDUCTION DERRIÈRE LES BARREAUX DE SAINTE-PÉLAGIE
Quelques mois avant le lancement du quotidien La Libre Parole, l’un des chefs du parti antisémite, le marquis de Morès, tenta vainement d’obtenir la collaboration d’anarchistes en vue.
Sous la IIIe République, il est fréquent qu’en prison, au régime politique, se coudoient des militants d’extrême droite et d’extrême gauche condamnés pour des discours ou des articles de presse. C’est ainsi que lors d’un séjour à Sainte-Pélagie, en 1891, les anarchistes Charles Malato et Michel Zévaco rencontrent le marquis de Morès. Cet aventurier mégalomane, cogneur, boulangiste puis figure de la Ligue antisémitique, travaille avec Drumont au lancement d’un journal et brûle d’y associer des plumes libertaires – la fine fleur de la subversion ! Parmi les noms envisagées : Michel Zévaco, Constant Martin, Émile Pouget et Charles Malato. Cette offre est repoussé avec dégoût par les intéressés [20].
« L’un s’appelle la réaction, l’autre la révolution »
Quelques mois plus tard, en avril 1892, le fameux journal voit le jour : c’est La Libre Parole, qui se taillera une part de marché en dénonçant à jet continu les « scandales juifs ». Bientôt il attaque Malato en le qualifiant d’« agent des Juifs », et plus précisément du baron Rothschild – cible obsessionnelle des antisémites.
Après avoir expédié une lettre d’insulte à Drumont, Malato exécutera l’escroc dans un livre paru en 1894 : « détourner contre les seuls Juifs les colères populaires. Débarrasser la banque chrétienne d’une rivale heureuse, faire oublier l’expropriation du capital productif en brûlant quelques chiffons de papier chez Rothschild, remplacer la guerre sociale par la religieuse, tirer les marrons du feu pour la monarchie cléricale [...], ah bien, non ! » Et de tracer une ligne infranchissable entre l’antisémitisme et l’anarchisme : « entre nos partis, la lutte est à mort : l’un s’appelle la réaction, l’autre la révolution » [21].
Cette assertion se vérifiera quatre ans plus tard quand, lorsque l’Affaire Dreyfus déchirera le pays, les anarchistes s’affronteront violemment aux antidreyfusards [22].
[1] Michel Dreyfus, L’antisémitisme à gauche. Histoire d’un paradoxe de 1830 à nos jours, La Découverte, 2009.
[2] Alphonse Toussenel, Les Juifs, rois de l’époque : histoire de la féodalité financière, G. de Gonet, 1847.
[3] Gustave Tridon, Du molochisme juif. Études critiques et philosophiques, Bruxelles, Édouard Maheu, 1884.
[4] Auguste Chirac, Les Rois de la République. Histoire des juiveries, P. Arnould, 1883.
[5] Albert Regnard, Aryens et Sémites. Le bilan du judaïsme et du christianisme (compilation d’articles parus dans La Revue socialiste), Dentu, 1890.
[6] Édouard Drumont, La France juive, Paris, Marpon & Flammarion, 1885.
[7] Pierre-Jospeh Proudhon (1809-1865) n’est pas listé ici car sa judéophobie foncière en resta au stade d’un sentiment confiné à ses carnets intimes. Il n’en fit pas une doctrine politique, contrairement à Toussenel, à Drumont et aux autres.
[8] Esther Benbassa, Histoire des Juifs de France, Seuil, 2000, citée par Dreyfus, op. cit., p. 21.
[9] Dreyfus, op. cit., p. 93.
[10] Leonty Soloweitschik, Un Prolétariat méconnu, étude sur la situation sociale et économique des ouvriers juifs, Bruxelles, Henri Lamertin, 1898.
[11] Zeev Sternhell, La Droite révolutionnaire (1885-1914), Folio, 1997, pp. 161-162.
[12] Grégoire Kauffmann, Édouard Drumont, Perrin, 2008, pp. 176-179.
[13] « La question juive », Gil Blas, 23 janvier 1890.
[14] Michel Dreyfus, op. cit., p. 73.
[15] Catherine Fhima, « La gauche et les Juifs », dans Histoire des gauches en France, vol. 1, La Découverte, 2004.
[16] Émile Pouget, « Youtres et jésuites », Le Père Peinard, 20 avril 1890.
[17] Philippe Oriol, Bernard Lazare, Stock, 2003, p. 30.
[18] Bernard Lazare, L’Antisémitisme, son histoire et ses causes, Léon Chailley, 1894. Ce livre, que Lazare renia peu après, fut récupéré des décennies plus tard par divers éditeurs antisémites, dont Kontre Kulture, d’Alain Soral.
[19] Bernard Lazare, Contre l’antisémitisme (Histoire d’une polémique), Stock, 1896.
[20] Sébastien Faure, « Vendus aux Juifs », Le Libertaire, 26 juin 1898 ; Charles Malato, De la Commune à l’anarchie, Stock, 1894, p. 272.
[21] Charles Malato, op. cit., pp. 272-273.
[22] « Janvier 1898 : Une première victoire sur les antisémites dans l’affaire Dreyfus », Alternative libertaire, janvier 2008.
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Face au racisme et au fascisme : résistance populaire
Gérald Darmanin l’a dit : sa loi immigration est « la plus ferme avec les moyens les plus durs de ces trente dernières années ». Et devant le Sénat il a fixé l’enjeu : il s’agit de savoir dans quelle société nous voulons vivre.
Notre réponse est claire : nous ne voulons pas vivre dans une société raciste, sécuritaire et anti-sociale !
Droits des étrangers·ères en France : une situation critique
Depuis plusieurs années, l’Etat français, Macron en tête, prend le chemin de la répression des mouvements sociaux, de la destruction des acquis sociaux durement gagnés par la lutte avec la destruction de notre système de retraites, notre sécurité sociale, notre agriculture, notre éducation nationale. Mais il prend également un chemin tout particulier sur la question du racisme, avec un passage d’un certain nombre de lois racistes : d’il y a 20 ans la loi sur le voile au lycée, puis les nombreuses lois immigrations qui se sont enchaînées avec trois dernières lois et mesures discriminant toute une partie de la population sur des motifs racistes : la loi séparatiste, le décret d’interdiction de l’Abaya ou encore la fameuse Loi Darmanin.
Ces mesures ont des conséquences concrètes, nous le voyons bien. Les mineur·es étranger·es sont plus que jamais abandonné·es par l’Aide Sociale à l’Enfance et se retrouvent à la rue, les collectifs de droits au logement sont criminalisés notamment avec la récente Loi Kasbarian, les Centres de Rétention Administrative, véritables prisons pour étrangers continuent de se construire avec une violence et un mépris du droit toujours plus flagrant, les jeunes des quartiers populaires continuent d’être éxecutés par la police, les imams sont expulsés, les « musulmans », avec ou sans papiers et français ou étrangers sont montés en boucs émissaires, avec en toile de fond la théorie omniprésente du « Grand Remplacement » nourrissant directement le terrorisme d’extrême droite.
Contre le racisme systémique en France : il faut agir maintenant !
Dans tout cela, les entreprises trouvent leur compte : la main d’œuvre précarisée ne coûte pas cher et la production juridique de sans-papiers n’a jamais été aussi forte. Nous apportons tout notre soutien aux grèves et aux combats légitimes des travailleurs et travailleuses sans-papiers.
La politique coloniale et impérialiste de l’Etat ne décline pas : Mayotte est un champ de bataille pour les policiers français, tout comme pour la répression et le traitement des « territoires d’outre-mers ».
Il est urgent de construire un front antiraciste et anti-impérialiste fort, à l’heure où Macron fait du Le Pen. Car les vrais séparatistes se trouvent à l’Elysée :
- Pour la régularisation de toutes et tous les sans-papiers
- Pour l’abrogation de la loi Darmanin
- Pour la fermeture des Centres de Rétention
- Pour le respect du droit d’asile, l’Aide Médicale d’Etat, un logement, un travail et une vie digne pour tous·tes
- Pour de réels moyens pour l’ASE
- Pour de vrais mesures contre les discriminations racistes dans l’accès au travail et au logement
- Contre les expulsions arbitraires et contre la déchéance de nationalité
- Contre le fascisme et les politiques racistes qui lui pavent la voie
- Contre la politique coloniale et impérialiste de l’Etat français
- Contre les violences policières
- Contre l’Islamophobie d’Etat et le contrôle du corps des femmes au travers des lois contre le voile
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Plan écophyto : Il n’en restera même plus le symbole
Le gouvernement français a prétendu répondre à la colère des agriculteurs en annonçant la fin du plan écophyto qui visait à la réduction de l’usage de produits phytosanitaires. Mais qu’est-ce que c’était que ce plan écophyto ? Et que peut-on tirer de son annulation ?
Le plan écophyto 2018 (ou Ecophyto I) est une mesure de 2008 qui visait à réduire de moitié l’usage de produits phytosanitaires en dix ans. Il a été le sujet de conflits importants entre, d’un coté, des associations environnementales et la Confédération paysanne et, de l’autre, le lobby agro-industriel avec la FNSEA en tête. Cette bataille législative a été « remportée » par le camp écologiste qui a pu bénéficier du Grenelle de l’environnement pour imposer sa vision et ses objectifs.
En effet, une telle réduction ne peut être que le résultat d’un changement de système faisant perdre aux produits phytosanitaires leur place centrale dans l’agriculture française. Cette vision s’oppose radicalement à celle la FNSEA qui évoquait une utilisation de pesticide déjà « raisonnée » et dont il fallait surtout mitiger les effets. Cette victoire des objectifs s’est cependant heurtée au mur des moyens. Les deux mesures phares sont la création du réseau Déphy, un réseau de fermes pilotes qui pourraient servir de modèle de transition vers le zéro phyto, et le bulletin de surveillance végétal (BSV) chargé de mieux informer les agriculteurs.
Ce premier plan écophyto a été un échec avec une augmentation de 20% d’usage de phytosanitaires ! Fort de cette leçon, le gouvernement choisi donc de mettre en place une mesure contraignante pour son plan écophyto II en 2015 : un nouveau marché, le Certificat d’économie de produits phytosanitaires (CEPP). L’idée est que chaque fournisseurs de phyto mène des actions pour en réduire l’utilisation afin de générer des certificats qui sont échangeables entre structures. Cette mesure devait permettre de réduire de moitié les pesticides pour 2025.
Un fiasco total
En 2023, les indicateurs en matière de pesticides sont au même niveau que 2009. La loi Egalim, effective depuis 2021, a en effet supprimé ce dispositif en séparant le conseil de la vente. À la place, la loi cherchait à favoriser l’agro-écologie à travers les marchés publics mais là aussi, c’est un échec : seul 20% de la restauration collective a atteint la qualité souhaitée contre les 50% affichés.
En 2024, le fiasco est total. Il est difficile de tirer des conclusions définitives tant le ratage est énorme et relève parfois de l’incompétence pure. On peut par contre attribuer cette incompétence à l’approche de communicant qu’à le gouvernement à l’égard de l’écologie et expliquant, en partie, le manque de moyens. On peut y voir aussi un manque de compréhension ou de volonté politique par rapport au jeu d’acteur de l’agriculture : aucune mesure prise concernant la concurrence des marchés internationaux ou des chaînes de distribution qui possèdent le pouvoir économique.
Nous pouvons surtout tirer la leçon du monopole technique qu’exercent les pesticides dans l’agriculture en France. Ce n’est pas sujet isolé mais c’est l’un des piliers de l’agro-industrie autour duquel elle organise son activité. Les objectifs des plans revêtent alors un caractère symbolique. Combattre les pesticides, c’est combattre un lobby puissant et organisé en France. Le prochain plan sera vraisemblablement un échec à son tour car, dans une telle situation, les contradictions du capitalisme apparaissent plus fortes que jamais : il est impossible de ménager à la fois le capital et notre santé.
Corentin (UCL Kreiz-Breizh)
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Non à la relance du nucléaire !
À partir de 14h00, devant l’ASN, 1 rue du Recteur Daure vers la Préfecture, rue Daniel Huet (14000)UCL CAEN
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Manif dimanche 21 avril contre le fascisme à #SaintBrieuc 14h Parc des Promenades
#SolidaritéAntiraciste
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#23MarsAntiraciste
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